INTRODUCING


Bonjour à tous et à toutes, et bienvenue dans CROSSROADS!!!

Comme vous l'aurez compris, il s'agira ici d'une énième Fanfiction inspirée de nos petits personnages adorés d'A-S. Vous aurez aussi deviné grâce à l'image de couverture ci-dessus que les personnages principaux seront donc Castiel et mon héroïne Cyrielle, qui elle est inspirée de mon perso que l'on peut créer dans A-S mais qui s'éloigne un peu (beaucoup ^  ^) du dress-code du site.

Pour ceux qui ne sont pas très familier avec l'anglais, j'ai choisi le titre: 
"CROSSROADS, one step forward, two steps backwards
Parce qu'il résume la trame de ma future histoire. Crossroads signifie "carrefour", 
"croisée des chemins" mais aussi "choix décisifs". Quant à la phrase de sous-titre: 
"Un pas en avant, deux pas en arrière", elle définit assez bien l'état d'esprit de mes personnages principaux, leurs histoires respectives ou tout du moins ce que vous pouvez déjà vous en faire comme idée ;)

JE VOUS CONSEILLE VIVEMENT DE LIRE l'article qui suit cette introduction surtout si c'est la première fois que vous venez ici. Il s'agit de la page NEWS de Crossroads qui est régulièrement mise à jour et qui vous fournira des compléments d'informations sur le fonctionnement de certaines choses sur mes chapitre ^.^ 
J'y publierai de petites interventions, des informations concernant le blog (concours, retard...), des nouveautés que vous trouverez sur le blog (notamment sur les Suggestions musicales au cours du récit que vous pouvez écouter en même temps que votre lecture en cliquant dessus) et des explications sur le fonctionnement de celles-ci si nécessaire, etc, etc...

Enfin voilà, je compte développer l'histoire de mes personnages, leur passé petit à petit, soyez patients et patientes, j'espère que vous apprécierez. De plus, si mes chapitres tardent à arriver, ce sera principalement dû aux diverses planches et illustrations que je tiens à dessiner moi-même au maximum pour illustrer certaines scènes que je décrirai dans mon récit et aussi parce que depuis que je suis diplômée, je rentre désormais dans la vie active et comme je travaille de nuit, il me faut le temps de me reposer un minimum pour être efficace. Je préfère vous prévenir tout de suite. 
Je suis seule à m'occuper de cette histoire surtout en ce qui concerne sa correction; aussi si vous voyez des fautes par ci, par là, faites moi en part! Je préfère que vous me le fassiez remarquer que de laisser mes chapitres avec des fautes bêtes ;)
Et n'oubliez pas que "l'habit ne fait pas le moine", mon introduction et mon image de couverture ne seront peut-être au premier abord pas à votre goût, mais laissez-vous une chance d'être séduit(e) par mon histoire :"3


Pour pouvoir lire mon histoire dans un ordre chronologique et parce que blogger ne permet pas le classement des articles du plus vieux au plus récent (je dois le faire manuellement),
CLIQUEZ SUR MESSAGES PLUS ANCIENS pour lire les chapitres dans l'ordre =)
Ce n’est pas logique mais je ne peux faire autrement xD
Et quand les chapitres seront trop nombreux pour être défilés, vous pouvez trouver sur la colonne de droite une rubrique CHAPTERS et il vous suffira de cliquer sur le chapitre que vous voudrez lire pour y accéder :)
Une dernière chose, les images des chapitres ne sont pas dans leur format original, aussi sachez que si vous CLIQUEZ DESSUS vous pourrez les voir plus en détails.

Enjoy Guys, hope you'll appreciate and keep rockin'!

DERNIERES NEWS



RAPPEL Bande Son des chapitres:

Vous trouverez sur certains chapitres des "suggestions d'écoute" entre parenthèses. Quand vous verrez écrit [ ♪ Listen ♫ ], il vous suffit de cliquer sur ce lien qui ouvrira une fenêtre vers une musique qui va illustrer votre lecture. Je vous invite à les écouter pour que vous puissiez vous plonger dans une ambiance ou une émotion particulière supplémentaire, mais bien sûr c'est selon votre envie. 
Laissez vous porter ;)
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NEWS! 08 Avril 2013
Mise à jour de la Bannière NEWS version 2013!
Cette année après le tirage au sort, vous retrouverez de gauche à droite Natsukoo, Kimberly, Weiya, Angelsyouyou et au centre, votre humble serviteuse: moi même ^.^
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NEWS! 23 Février 2013LE JOUR EST ARRIVÉ! C'est ma fiction contre celle de ma Louloute Yuiko qui se retrouve en face à face pour le titre de COUP DE CŒUR de l'année 2012.
J'espère compter sur vous pour voter EN MASSE pour Crossroads bien que je sois consciente que la plupart de mes lectrices soient aussi (et avant tout) des lectrices de l'histoire de Yui.
Allez, votez DECAY018 en suivant le lien ci dessous et si par miracle je passe ces demi-finales, j'organiserai un petit quelque chose pour vous remercier cela va sans dire! GO GO GO!
Vous avez jusqu'à samedi prochain! LOVE !

http://annuaire-fiction-as.skyrock.com/3135097316-Coup-de-coeur-de-l-annee-2012.html

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NEWS! 02 Février 2013

MERCI AUX 48 PERSONNES AYANT VOTÉES POUR CROSSROADS POUR LE COUP DE CŒUR DE L’ANNÉE 2012 DU BLOG ANNUAIRE FICTION AS!!! Me voici qualifiée pour les quarts de final et j'y affronterai mon amie Yuiko (dont vous trouverez la fiction en course dans mes liens à droite). Ca va pas être de la tarte mais je compte sur vous! GO GO GO! 
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NEWS! 02 Février 2013

BONSOIR A TOUTES ET TOUS! 
Ça y est, c'est à mon tour de me BATTRE EN DUEL POUR LE TITRE DE 
"COUP DE CŒUR DE L’ANNÉE 2012"
C'est vous et vous seul(e)s qui pouvez défendre la place de ma Fiction CROSSROADS et les votes sont déjà serrés! JE COMPTE SUR VOUS! Rendez vous sur le lien ci dessous:

http://annuaire-fiction-as.skyrock.com/3135097316-Coup-de-coeur-de-l-annee-2012.html

C'est jusqu'à samedi prochain, n'hésitez à partager ça autour de vous pour que mon histoire passe à l'éta
pe suivante!
THANKS TO YOU ALL!
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NEWS! 28 Août 2012

Coucou les gens!
Alors, je jongle entre l'écriture de mon 8ème chapitre bien entamé durant mes petites vacances à la montagne, les brouillons des illustrations qui ponctueront ce dernier et l'illustration qui clôturera la fiction de ma petite Yuiko (dont vous pouvez découvrir l'histoire dans mes blogs favoris à droite ou plus facilement en cliquant ICI). Malheureusement, je ne peux en dire plus tant sur l'un que sur l'autre, ce serait gâcher la surprise et c'est pas mon genre DE SPOILER! (pas comme certains/nes).

Encore une fois merci de votre patience à toute épreuve et si vous trouvez le temps long, sachez que CROSSROADS est inscrit sur un nouveau site de recensement de fictions sur lequel vous avez la possibilité de publier VOTRE CRITIQUE de mon histoire de façon plus approfondie. Le lien ci-dessous vous mène directement à mon article, laissez votre critique et la note sur 20 que vous estimez que CROSSROADS mérite et celle-ci sera publié sur l'article lui-même. Bonne idée non?

Cliquez ici ^.^ 

Bien à vous!
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NEWS! 12 AOÛT 2012
Salut à tous et toutes!

Voilà pour ceux qui ne le sauraient pas encore, je viens d'emménager à Nantes depuis un peu plus d'une semaine j'étais donc très occupée depuis la remise de mes diplômes :)
C'est maintenant terminé, je suis bien installée et je vais pouvoir reprendre le rythme d'écriture de CROSSROADS plus régulièrement ^^

A ce propos, je pars une semaine à partir de demain dans les Pyrénées pour me perdre dans la montagne avec My Nemesis (mon copain) et sa belle famille. Cette "mise au vert" ne sera pas une simple semaine de vacance puisque j'emporte avec moi mon ordinateur et je vais en profiter pour écrire là bas le huitième chapitre de cette fiction que j'aborde d'une nouvelle façon. Je vais donc profiter de ce changement de paysage pour envisager ce chapitre particulier en puisant mon inspiration ailleurs que d'habitude. En espérant que l'effort sera payant auquel cas, si je vois que ce chapitre ne prend pas forme comme je l'imagine, je ferai un chapitre "normal" comme ce que j'avais prévu à la base. 

Thanks for your attention guys and see you in a week ;)
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NEWS! 24 JUIN 2012
Bonjour à tous et toutes!
Voilà une semaine que mon septième chapitre a été publié et malgré les commentaires qui se font rares quant au contenu de celui-ci, il semble vous avoir plu malgré l'attente de sa publication. ENCORE MERCI D'AVOIR ÉTÉ AUSSI PATIENTES!
Cette NEWS a pour but de vous prévenir de ma situation. Je suis en période d'examens depuis mon retour de stage le 5 Juin dernier. Ce qui veut dire que mes projets de fin d'année passent AU DESSUS de tout le reste y compris de Crossroads. Je vous entends déjà:
"Oh nooooooon on aura jamais la suite, c'est une catastrophe, on ne s'en remettra jamais!"
Calmez vous, calmez vous *hohoho*. 
En vérité, la fiction est loin d'être terminée je n'ai pas l'intention de l'interrompre, au contraire, mais soyez prévenu que l'écriture du Chapitre 8 prendra du temps! Sûrement beaucoup car mes examens sont fin Juillet et que je déménage début Août. En gros résultat de l'équation: Chapitre 8 = Fin Juillet/Août 
Voilà en attendant, FAITES PARLER DE CETTE HISTOIRE AUTOUR DE VOUS si vous pensez qu'elle le mérite. Partagez les liens du blog et faites la connaître au maximum ;)
Ciao ciao everyone!
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NEWS! 14 MAI 2012
Hélas, je ne pourrai pas finir le septième chapitre de Crossroads avant mercredi, j'en ai peur j'ai bien trop de travail.  
ごめんな m(_  _)m
Sinon une bonne nouvelle, vous pouvez désormais découvrir l'interview réalisée par la créatrice du blog Annuaire-Fiction-As de moi même pour le Coup de Cœur du mois de Mai, j'espère qu'elle vous éclairera un peu plus sur mon histoire :p

http://annuaire-fiction-as.skyrock.com/3090036101-Interview-de-DECAY018.html

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NEWS! 02 MAI 2012
YOUHOUUUUUUUUUUUU *danse de la joie au petit matin*
BONNE NOUVELLE POUR COMMENCER LA JOURNÉE! 
CROSSROADS A ÉTÉ ÉLU COUP DE CŒUR DU MOIS DE MAI et ça c'est grâce à vous!!!!
Mille mercis, on peut dire sans le moindre doutes que vous êtes les meilleur(e)s lecteurs/lectrices de la terre ^w^ Vous trouverez ici les résultats des votes:

Bien entendu, cette victoire n'étant pas seule mienne, je vous offrirai comme promis l'illustration spéciale de Castiel et Cyrielle! Gnééééhéhéhéééé à mon avis vous allez aimer et pour ceci, ce soir, malgré ma fatigue, je vous promets un petit Live de derrière les fagots pour commentcer le lineart et la colo :p

Encore merci à tous et see you tonight par ici: http://livestream.com/decaystoonstruck !!
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NEWS! 27 Mars 2012:
Quelques uns/unes d'entre vous auront déjà tenté l'expérience, je vous informe qu'il m'arrive de me "produire" en live sur la toile. Qu'est-ce-que ça veut dire? Eh bien c'est simple, grâce à un certain podcast, vous pourrez me voir dessiner EN DIRECT  à l'adresse suivante: 
http://www.livestream.com/decaystoonstruck
 C'est pas beau ça? Haaa la technologie! ^.^
De plus, si vous désirez discuter avec moi de Crossroads ou de la vie, il y a un petit tchat incorporé où il nous sera possible de papoter. Je ferai des annonces régulièrement sur mon profil FB pour vous tenir au courant des moments où je compte me connecter en Live.
On se marre bien, vous allez voir ;) See you there!
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NEWS! Mars 2012: 
Vous trouverez désormais sur certains chapitres des "suggestions d'écoute" entre parenthèses. Quand vous verrez écrit [ ♪ Listen ♫ ], il vous suffit de cliquer sur ce lien qui ouvrira une fenêtre vers une musique qui va illustrer votre lecture. Je vous invite à les écouter pour que vous puissiez vous plonger dans une ambiance ou une émotion particulière supplémentaire, mais bien sûr c'est selon votre envie. 
Après avoir testé la playlist Deezer, je me suis finalement tournée vers YouTube dont la banque de son est beaucoup plus complète! Aussi dès que vous verrez ces suggestions sur les articles (au début ou en milieu de chapitre) passez simplement votre souris et cliquez sur le lien, votre musique se lancera automatiquement dans une nouvelle fenêtre, ça vous permettra de ne pas avoir à chercher 15 ans dans une playlist et de rester plongé dans l'histoire. 

C'est un procédé que je voulais mettre en place depuis longtemps mais sur blogger ça s'est avéré un peu complexe mais j'ai trouvé cette solution ^ ^ J'espère que ce concept vous plaira et vous aidera à vous plonger encore plus dans mon histoire. Laissez vous porter! ;)
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PROLOGUE


*inspire*

Le vent souffle. La brise marine et iodée fouette mon visage balafré. La plaie sur ma joue est douloureuse encore. Le sel contenu dans l'air ravive la douleur. Le souvenir. Si proche. La fin. Si inattendue.


*expire*


Je me suis demandée 10 fois, 100 fois, 1000 fois pourquoi je ne me laisserais pas tomber dans le vide et porter par cette brise jusqu'à finir engouffrée dans les abysses de l'océan qui se déchirait à mes pieds. Se déchire comme moi. Pourquoi est-ce-que je continuerai sans Elle? Comment le pourrais-je?
Oui, j'ai toujours été seule, depuis toujours je n'ai pu compter sur personne... à part Elle. Cette femme aussi brisée que moi. Je ne comprends encore pas comment Ils ont pu me confier à elle, vu son état, vu son attitude et la vie qu'elle menait. Probablement que nous étions les seules personnes au monde, ou tout du moins dans cet État, à pouvoir nous supporter mutuellement. Il aurait été dangereux pour tout autre personne "saine" d'être placée sous Sa garde. Et pourtant je la serre...

*inspire*

Si petite maintenant. Plus détruite que jamais. Je serre cette personne que j'ai chérie du plus profond de mon âme. Réduite à l'état de poussières insignifiantes. Plus fragile que jamais. Moi qui craignais de La voir s'envoler, je dois aujourd'hui redoubler d'efforts pour La contenir. Pour ne pas qu'Elle s'échappe. Pas tout de suite... 

   - Pas trop vite. Laisse-moi encore... un peu de temps.

Je ne peux même pas dire avec certitude que ce que je m'apprête à faire était ce qu'Elle aurait souhaitée. Nous n'avions pas l'habitude de parler de ça. D'après... De la Mort. Toutes deux ne croyant plus en grand-chose qu'en nous même, nous profitions de chaque instant, de la meilleure et de la pire des façons que l'on puisse imaginer.

Peut-être suis-je coupable. Coupable de ne pas l'avoir plus bridée. De l'avoir laissé s'enfoncer autant que moi dans les profondeurs gluantes de nos propres ténèbres. J'aurai pu... J'aurai dû lui apporter la Lumière qui lui manquait, je n'ai fait que rendre plus opaque la noirceur de sa vie. Mais je n'ai aucuns regrets. Elle m'a apporté cette Lumière, des sourires gonflés de bonheur et de tendresse. J'ai essayé, je crois être parvenue à lui rendre tout l'amour qu'Elle m'a donné. Je l'espère... Mais pourquoi... pourquoi n'ai-je pas pu la sauver?


Avec Ses cendres s'envolent ces questions que je ne dois plus me poser. Je dois laisser partir cette dernière nuit. Ces derniers mots, ces derniers gestes. Les siens, les miens. Je dois oublier le son de cette porte que j'ai claquée derrière moi. Je dois oublier cette bouteille brisée sur mon visage et l'entaille profonde qu'elle provoqua. Je dois oublier la sensation du sang qui dégoulinait sur ma joue et le son mate des gouttes qui tombaient sur la moquette. Je dois oublier Ses cheveux arrachés dans ma main et la chute provoquée par la violence de Sa charge.  Je dois oublier cette nuit froide passée dehors, allongée sur le banc du parc, contusionnée et meurtrie. Je dois oublier ce matin pâle où j'ai glissé la clé dans la porte et où je l'ai trouvé, gisant sur la table basse du salon. Oublier le son mate des clés que j'ai lâchées sans m'en rendre compte. Oublier l'odeur du parfum qui restait dans Ses cheveux quand j'ai serré Son corps froid dans mes bras. Oublier, oublier...



Oublier...

Je lui avais fait la promesse de me battre, de ne plus jamais verser de larmes pour quiconque. Mais là c'est impossible.

   - Pardonne-moi! 

C'est suffocante que je sens une pression insoutenable sur mon cœur et mon estomac. La bile remonte, faute d'avoir eût de l'appétit depuis Sa disparition. Je me suis écroulée, terrassée. Le monde venait de s'assoir sur mon dos et s'appuyait pesamment sur moi, de tout son poids. Il m'écrasait les poumons et le crâne. Je hurlais. Mes cris se sont instantanément noyés dans le vacarme des vagues qui fouettaient le pied de la falaise. Ils ont été balayés par les bourrasques de vent qui brûlaient mon visage. J'étais seule. Jamais je ne m'étais sentie aussi seule sur terre. Pour la première fois j'ai prié. Qui? Je ne sais pas. Mais j'ai souhaité du plus profond de mon âme que la douleur cesse, que l'on arrête de se jouer de moi. J'ai tout réfuté. Je ne voulais plus croire qu'Elle était partie, la seule personne à m'avoir élevée, aimée pour ce que j'étais sans jamais me juger. 

Je voulais cracher sur ce monde qui me dégoûtait, que je trouvais injuste et en même temps, je voulais que quelqu'un m'entende, que l'on me comprenne, que l'on me soutienne dans cet affreux moment de ma vie mais je n'avais personne vers qui me tourner. 





 Personne... que je ne connaisse encore.












CHAPTER 1:

   "- Étant donné les évènements récents qui vous ont frappés, votre récente majorité ainsi que les progrès quant à votre intégration en société, nous sommes enclin aujourd'hui à vous accorder votre demande d'émancipation...


Du temps perdu, tout ceci n'est que pure perte de temps. Qu'est-ce que je fous encore là.

   - ... cependant, vu votre lourd passé, sachez qu'à la moindre incartade de votre part et vous retrouverez votre statut de pupille de l’État, vous serez à nouveau sous tutelle et nous saisirons tous vos biens.

Tout ça pour en arriver là. Leurs belles paroles ne sont que du vent et je vois dans ses yeux que c'est une sorte de victoire pour lui. De me tenir encore enchaînée quelque peu, que je ne mérite pas d'être libre et qu'il attend avec impatience le faux pas de ma part. Je dois rester calme.

   - Bon, concernant les biens qui vous reviennent désormais de droits: 
                              * 30 000€ d'économies transférés ce matin même sur votre compte bancaire.

Une bagatelle à côté de ce qui lui revenait de droit. Elle avait trimé toute sa vie pour que des salauds tirent avantage de ses faiblesses. J'avais contribué à économiser ce "petit" montant mais cet argent aurait toujours un goût amer.

                              * La maison située au 18 de la Rue Mozart, en l'état.

Sur ce coup-là j'ai du boulot qui m'attend. Ranger... ce foutoir que je repousse jusqu'à la dernière minute depuis la nuit tragique de Son "départ". Nettoyer ce merdier.

                              * Ainsi que le véhicule immatriculé 18 CNA 33,
que vous serez autorisée à utiliser une fois votre permis de conduire obtenu bien entendu.

Son Monstre, celui qu'Elle m'avait promis de me donner à l'obtention de mon permis et qu'Elle m'avait appris à conduire. Je pense que mon interlocuteur en avalerait sa cravate s'il savait que depuis deux ans j'avais déjà conduit cette bécane sur des centaines de kilomètres.
   - Bien. Avez-vous quelque chose à ajouter Mademoiselle Redfield?
   - ... J'peux y aller?
   - Hé bien ma foi, oui. Je n'ai rien à ajouter pour ma part. Voici votre justificatif d'absence pour la matinée. Vous le remettrez à la directrice de votre nouvel établissement scolaire dès cet après-midi. On vous y attend, annoncez-vous simplement à l'entrée.
Je pris le papier qu'il me tendait par-dessus son bureau sans grande conviction et l'inspectais rapidement. Je lu l'entête:
   - Lycée Sweet Amoris?! Vous êtes sérieux?!!
   - A quel propos?
   - Laissez tomber... Je me demandais juste quel était l'idiot qui avait pu baptiser un lycée d'un nom aussi débile.
Je le vis rester sans voix avec sa mine déconfite, et avant qu'il n'ait eu le temps d'ouvrir la bouche, je me levais de mon siège sur lequel j'étais affalée depuis une bonne demi-heure, empoignais mon sac en bandoulière dans le lequel je fourrais mon justificatif entre une trousse et un calepin.
   - Je sais que cela ne vous ravie pas de reprendre votre scolarité, mais c'est ce qui était précisé dans son testament, et c'est une condition "non négociable", selon ses propres mots.
 Ses propres mots. Son testament. C'était encore assez difficile à avaler aussi je coupais court à cette entrevue qui avait durée bien assez longtemps.
   - Bon, vous n'avez plus besoin de moi... Fis-je.
L'homme derrière son bureau acquiesça et me tendit la main qu'il s'attendait à me voir serrer. Voilà le genre de truc typique qui m'a valu mon statut de "cas clinique d'asociale". J'ai regardé sa main, levé la tête vers lui et ai planté mes yeux dans les siens pour qu'il y lise mon dédain. Je tournais les talons et quittais la pièce sans fermer la porte derrière moi. 
En passant dans le hall menant vers la sortie, le bruit de mes chaînes alerta la secrétaire qui me suivit du regard comme elle l'avait fait à mon arrivée. Je continuais mon chemin tout en sortant ma main gauche de ma poche et en lui décochant un majeur levé bien haut à son attention. Nul doute qu'elle m'adressa  un juron quand je franchis la porte.
Octobre ne dérogeait pas à sa réputation. Le temps était gris, froid, humide et les feuilles des arbres tombaient petit à petit, embourbant les caniveaux de la ville. Je crachais un nuage de buée tout en fouillant mon sac duquel j'en sortis un paquet de cigarettes bleu roi. Les Siennes. J'en tirais une que je portais à mes lèvres, mis en marche mon briquet, tirais longuement sur la "tige" et soufflais lentement la fumée. Au goût âpre qui envahit soudain ma bouche et ma gorge, je souris en me rappelant pourquoi et combien je les trouvais dégueulasses. 
Une fine bruine tombait du ciel. Je me saisis de ma capuche, l'enfilais et refermais mon perfecto puis je pris la direction de mon nouveau lycée.
   - Hahaha. Putain, fait chier...
L'idée de me retrouver entourée de gens 5 jours sur 7, d'avoir à écouter et à supporter les conneries des profs et des élèves, faire des EFFORTS pour m'intégrer sans quoi, je retournerai à la case départ.
   - ... Mais j'en ai jamais eu envie, ce n’est pas aujourd'hui que ça va changer.
Je terminais ma cigarette et en écrasais rageusement le mégot sur l'asphalte.
   - Fait chier! Fait chier! Fait chier!!!
Je sentais que mes pas s'accéléraient, mes muscles se contractaient et je bousculais les passants sans ménagement sur mon chemin.
   - HEY! Excusez-vous nan?! cria une femme à mon attention.
   - Va t'faire voir, marmonnais-je en poursuivant ma route.
Au fur et à mesure que j'avançais, les maisons cédèrent la place à un grand espace vert et arboré duquel se dégageait un énorme bâtiment bleu azur vitré, entouré d'un grillage. Je ralentis l'allure et me plantais devant le portail fermé. L'interphone possédait un petit écran apparemment éteint ainsi qu'un haut-parleur. Au-dessus de l'unique bouton, une petite diode rouge clignotait. Je soupirais et me résignais à appuyer dessus.
J'attendis quelques secondes durant lesquelles j'observais la cour vide de tout élève. Sur un des versant du bâtiment était accroché une immense pancarte sur laquelle on pouvait lire: 

" LYCÉE MIXTE SWEET AMORIS"

   - C'est toujours mieux qu'un lycée entièrement rempli de gonzesses, me suis-je dite.
Le haut-parleur se mit à grésiller et une voix en sortie:
   - ... Oui?
   - ... Je suis Cyrielle Redfield. J'ai rendez-vous avec votre directrice.
Il y eu un court moment d'attente puis à nouveau:
   - ... Très bien, je vous ouvre.
Le portail émit un "clic" et la porte s'entrouvrit. Encore une fois, je ne pus m'empêcher de soupirer et fis un premier pas vers l'établissement. En levant la tête j'aperçus une caméra de surveillance dirigée vers le portail; au fond, un second bâtiment que je devinais être le gymnase de l'école. Plusieurs bancs étaient éparpillés pour la plupart sous de grands arbres divers et variés, et la pelouse était d'un vert parfait.
   - Tellement parfait qu'on dirait qu'elle est fausse, pensais-je. On est loin de l'état du jardin de la maison.
Sur la gauche, je vis une petite serre en verre devant laquelle poussaient des parterres de fleurs multicolores. Les vitres parvenaient à capter le peu de rayons que le soleil daignait bien envoyer derrière la couverture de nuages gris. Soudain, une volute de fumée s'échappa de derrière la serre. Je crus que mes yeux me jouaient un tour à cause de la fine pluie qui tombait devant moi mais à nouveau, un nuage de fumée se détacha du toit de la cage en verre. Je me rapprochais de la serre, intriguée par ce phénomène puis commençais à la contourner.
Je vis alors un garçon adossé à celle-ci, le visage perlé de pluie tourné vers le ciel, les yeux fermés, portant nonchalamment sa cigarette à sa bouche. Je pensais avoir été discrète en m'approchant mais quelques secondes après m'être arrêtée, il pencha son visage vers moi et entrouvrit ses yeux qu'il planta dans les miens.
Je n'avais encore jamais vu ce garçon.
   - Avec des cheveux aussi rouges, tu parles que je m'en serai souvenu, pensais-je.
Pourtant quelque chose me troubla Il me fixait tout comme je le faisais mais ses pupilles me transperçaient. C'était comme si son regard s'était infiltré dans mon corps et courrait dans mes veines, me scannant de l'intérieur et dénichant tous mes secrets et mes faiblesses. Cet homme que je n'avais jamais vu de ma vie me connaissait. J'en étais certaine et sans m'en rendre compte, je fronçais les sourcils. Mon cœur cognait dans ma poitrine, boosté par une vague d'adrénaline. Je serrais les poings car j'avais à ce moment-là la certitude qu'il était dangereux. Pour moi.
Il reprit une bouffée de nicotine et la souffla cette fois dans ma direction, un très léger sourire, presque invisible, sur son visage. Les mots qui suivirent sortirent tout seul de ma bouche, agressifs:
   - Qui...es-tu?!

   - CYRIELLE??
Je sursautais et me tournais dans la direction de la voix masculine qui me hélait. Un garçon blond en chemise blanche s'approchait de moi à vive allure, une pochette plastique tenue au-dessus de sa tête pour se protéger de la pluie.
   - Cyrielle Redfield?
   - Oui c'est moi, répondis-je.
   - Je te cherchais. Je suis Nathaniel, le délégué principal de cette école. La directrice m’envoie te chercher, elle t’attend dans son bureau.
   - ... Ah.
   - Pas très bavarde hein? S’amusa-t-il. Ça ne fait rien, suis moi, je vais te guider.
Il commença à s'éloigner à grandes enjambées vers le préau à l'abri, s'attendant à ce que je le suive mais je m'étais retournée vers la serre pour finir ma "conversation" et... Lui... avait disparu. Seul restait dans une flaque d'eau son mégot encore rougeoyant.
   - Cyrielle? rappela Nathaniel.
   - ... Ouais... J'arrive.

CHAPTER 2:

Les couloirs du lycée étaient clairs et remplis de centaines de casiers en métal disposés le long des murs. Certains d'entre eux semblaient encore neufs, d'autres étaient défoncés, la tôle déformée ou les portes taguées de gribouillis illisibles.

Nathaniel marchait devant moi d'un pas assuré, la tête haute. De lui se dégageait une assurance certaine. J'imagine qu'être délégué principal de tous les élèves du lycée n'était pas une tâche facile et qu'il fallait des épaules solides pour tenir ce poste. Plusieurs doubles portes menaient apparemment à des escaliers pour accéder aux salles de classe des étages supérieurs. Le bureau de la directrice quant à lui, comme toute la section administrative de l'école, était situé au rez-de-chaussée.
   - Alors? me demanda-t-il, me faisant sortir de mes pensées.
   - "Alors" quoi?
   - Tu trouves ça comment? 
   - ... Honnêtement?
Il étouffa un petit  rire:
   - Oui honnêtement.
   - Hé bien... Je trouve ça un peu "aseptisé". 
   - A ce point?! 
J'essayais de me rattraper histoire de ne pas passer tout de suite pour un énergumène dégoûté de tout. Ce que j'étais.
   - Ben tu sais, c'est ce que j'ai reproché à tous les établissements scolaires dans lesquels j'ai mis les pieds jusqu'à présent, et aucun n'a dérogé à la règle pour le moment désolée. Il n'y a que l'extérieur de vraiment agréable de mon point de vue.
   - Eh bien, ils ne mentaient pas alors les gens qui parlaient de toi, répondit-il.
Je levais un sourcil:
   - Les gens? Quels gens? Qui t'a parlé de moi?
   - Personne concrètement, en tant que DP* (Délégué Principal) j'ai accès aux dossiers de tous les élèves de cette école. Et en tant que nouvelle élève, j'ai parcouru le tien pour savoir à qui j'avais "affaire".
Voilà qu'il commençait à prendre l'intonation de ces foutus médecins et psychologues qui m'avaient suivis durant mon enfance.
   - Et alors? 
   - "Alors" quoi? Sourit-il.
   - Un problème avec la personne en face de toi à présent?
Nathaniel ouvrit des yeux ronds. Mon visage renfrogné et le ton énervé de ma phrase l'étonna. Il avait la main posée sur la poignée d'une porte noire sur laquelle était écrite: 

"Bureau du Proviseur, prière de frapper avant  d'entrer"

   - Pas... Pas du tout, bafouilla-t-il tout en frappant à la porte, je ne faisais qu'une remarque...
   - Hé bien la prochaine fois tu apprendras à utiliser des pincettes avec les gens que tu ne connais que depuis 5 minutes, et quand il s'agit de moi surtout, abstiens-toi tout bonnement!
Il resta coi et finit par ouvrir la porte quand la secrétaire l'y invita. Il m'annonça pour qu'elle transmette le message à sa supérieure. Elle utilisa un interphone, j'entendis la voix de la directrice en sortir:
   - Faites-là entrer dans mon bureau, invitez Nathaniel à la suivre.
   - Très bien, répondit la secrétaire. C'est par-là, m'indiqua-t-elle en pointant une porte à sa gauche.
Nathaniel, toujours devant, me devança et ouvrit la porte en bois massif. Le bureau de la directrice jurait avec ce que je venais de voir du lycée. On se serait cru dans une vieille bibliothèque ou une maison très ancienne des années 50. Les murs étaient en bois avec des tapisseries vert émeraude agrémentés de motifs végétal. Ici pas de lumière brute. De fins rideaux étaient tirés sur l'immense fenêtre au fond de la pièce et de petites lampes murales disposées ça et là offraient une lumière tamisée assez chaleureuse.
   - Ça sent pas bon, pensais-je.
Cette atmosphère ne m'inspirait pas. Elle se voulait rassurante mais comme les tapisseries aux murs, ce n'était qu'une façade pour moi. La directrice se trouvait derrière son bureau dans un tailleur rose pâle qui me rappelait les vieux ensembles Chanel très en vogue à l'époque. Elle griffonnait quelque chose et sans lever les yeux, s'adressa à nous:
   - Nathaniel, je vous remercie d'avoir pris sur votre temps de cours pour effectuer cette tâche pour moi, je suis toujours très occupée comme vous le voyez.
Ce mot tâche résonna dans sa bouche d'une façon qui m'agaça comme si il m'était adressé directement.
   - Ça fait partie de mon travail Madame, répondit-il.
Elle finit par relever la tête et lui adressa un sourire:
   - Dans ce cas, je vous prierai d'attendre dans le bureau de la secrétaire que j'en ai fini avec votre nouvelle camarade de classe pour que vous puissiez la conduire en cours avec vous par la suite
   - Bien Madame.
Et il s'éclipsa en refermant la porte. Je restais debout devant l'imposant bureau, en attendant que la directrice daigne bien m'accorder un peu de son temps. Elle finit de griffonner 3 feuilles de papiers, ce qui lui prit bien 5 minutes pendant lesquelles elle ne m'adressa pas un mot, avant de croiser les doigts devant elle après avoir reposé son stylo et d'enfin commencer à me parler. Un sourire s'afficha sur son visage mais rien à voir avec celui qu'elle venait d'adresser à Nathaniel quelques minutes auparavant. Non, celui qu'elle colla sur sa face rondouillarde était on ne peut plus faux.
   - Bien... Mademoiselle...?
   - Redfield. Cyrielle Redfield. Répondis-je sèchement.
   - Vous ne voulez pas vous assoir que nous discutions de votre situation? fit-elle en m'indiquant un siège, son sourire dégueulasse toujours accroché aux lèvres.
   - Je suis très bien debout, merci.
Son sourire s'effaça sur le champ et elle croisa de nouveau ses doigts.
   - Pas de temps à perdre n'est-ce-pas? Ça tombe bien, je n'ai pas très envie d'en perdre avec vous non plus.
Voilà ce à quoi je m'attendais d'elle depuis le début.
   - Nous allons donc essayer de rester courtoises vous et moi, même si je sais de part vos antécédents que ce ne sera pas facile pour vous. L’Inspection Académique accorde beaucoup d'importance et d'intérêt pour votre cas c'est pour cela que vous êtes aujourd'hui dans MON établissement...
Je bouillonnais intérieurement mais m'efforçais de me contenir. Elle faisait les 100 pas derrière son bureau sans me regarder:
   - ... malgré les réticences premières que j'ai pu soulever lorsque l'on m'a confié votre dossier. Seulement, j'ai certains, comment dirais-je... Avantages à vous avoir sous ma houle aussi si VOUS faites des efforts et que vous vous tenez comme une personne civilisée ici, il ne devrait pas y avoir de soucis et nous y trouverions toutes deux notre compte. Vous ne désirez pas vous retrouver sous tutelle encore une fois avec tous les inconvénients que cela sous-entend?
Son foutu sourire réapparu quand elle se retourna vers moi.
Cette vieille harpie me prenait pour un faire-valoir. Si un quelconque inspecteur se pointait et voyait que j'étais bien rangée et soumise, cela lui assurerait éloges et promotions à n'en pas douter.
   - Des efforts pour m'intégrer j'en ferai, ne vous en faites pas pour ça... répondis-je en la toisant.
Mais j'en redoublerai pour la pourrir et la faire redescendre sur terre le moment venu. Elle croit me connaître parce qu'elle a lu les rapports médicaux de ces dernières années? Pour le coup, j'ai de la chance que l'anniversaire de ma majorité n'arrive que dans un mois. En tant que mineure, il y a certaines parties de mon dossier qui sont encore classées sous le "secret médical". Mais ce n'est que le haut de l'iceberg. Si elle savait... Je souriais.
   - Y a-t-il quelque chose d'amusant dans ce que je viens d'énoncer? grogna-t-elle.
   - Non.
   - Non "MADAME". Dans cette école, la politesse commence par là.
Connasse, elle commençait sérieusement à me taper sur le système.
   - Non Madame.
Son sourire s'élargit de satisfaction. Elle continua son discours:
   - Vous vous plierez au règlement intérieur de ce lycée et respecterez chacune de ses règles ainsi que son personnel éducatif. Des questions?
Je secouai la tête, je ne voulais pas encore lui accorder la satisfaction de lui lécher les bottes.
   - Une dernière chose. Je passe outre tous vos... (Elle eut une grimace de dégoût) piercings mais vous devrez faire un effort vestimentaire. J'estime déjà que vous avez de la chance d'atterrir dans une école qui n'a pas d'uniforme obligatoire donc rendez-vous un peu plus présentable à l'avenir. Et cela commence dès demain. Vous pouvez disposer.
Et elle retourna s'asseoir derrière son bureau vaquer à ses occupations.

Je fis demi-tour et sortis. Nathaniel m'attendait dans le couloir.
   - Comment ça s'est passé? demanda-t-il.
   - Je vais difficilement m'entendre avec cette espèce de connasse, voilà mais je ne m'attendais pas à en faire ma meilleure amie dans tous les cas.
Il me regarda un court instant puis rigola tout en se remettant à marcher.
   - Qu'est ce qu’ il y a de drôle?
   - Pas grand-chose, c'est toi qui me fais rire. On peut dire que tu es franche comme nana.
   - Ce n'est pas parce que je suis asociale que je n'ai pas de langue. Je ne parle pas souvent aux gens mais ça ne m'empêche pas de dire ce que je pense quand j'estime que c'est nécessaire.
Il rit à nouveau.
   - Tu as raison. Excuse-moi pour mon indélicatesse de tout à l'heure, je ne voulais pas te blesser.
   - T'en fais pas pour moi, j'ai l'habitude. Mais toi tu devrais te détendre, t'es pas devant la dirlo. C'est quoi toutes ces phrases alambiquées?  On a le même âge que je sache, relax.
   - Je suppose que c'est parce que je travaille trop dans ce lycée en sa compagnie.
Je soupirai:
   - T'es sympa mais tu m'as l'air désespérant comme gars.

Il eut un éclat de rire auquel je ne m'attendais pas. Bon au moins, ma première rencontre dans ce lycée n'était pas aussi catastrophique que ce que je m'étais imaginée. Nous avons monté les marches d'un étage pour arriver devant une salle de classe. La porte possédait une petite fenêtre dans laquelle on pouvait voir ce qui se passait à l'intérieur. Nathaniel y frappa et le professeur lui intima d'entrer. La classe contenait approximativement une trentaine d'élèves de tout genre.
   - Ah Nathaniel c'est vous! fit le professeur. Vous nous confiez donc mademoiselle... (il consulta sa liste) Redfield c'est bien ça?
   - Oui, répondis-je.
   - Bienvenue! Je suis Monsieur Faraize votre professeur d'Histoire-Géographie. J'espère que vous vous plairez dans notre lycée.
Les élèves s'étaient tous tournés vers moi à mon arrivée, me jaugeant. Rien d'inhabituel pour moi de ce côté-là.
   - Bon les places sont toutes prises hormis celle au fond à droite, aux côtés de Castiel. Installez-vous, nous allons poursuivre notre cours. Nathaniel, rejoignez votre place je vous prie.
Il s'exécuta et j'allais en faire autant quand je vis qui était le fameux "Castiel" qui allait être mon partenaire de table pour les longs mois à venir.
   - Le mec de la serre... murmurais-je.
   - Un problème Mademoiselle? S’enquit le professeur.
Je vis que je m'étais planté entre les rangées de table sans bouger. Castiel me sourit, je "fronçais" des paupières légèrement.
   - Non.
   - Dans ce cas asseyez-vous et poursuivons si vous le voulez bien.
Et il se tourna vers le tableau noir. Je m'assis donc, enlevais mon perfecto et commençais à déballer mes affaires sur la table. Petit à petit, les autres élèves se tournèrent également vers le tableau. Tous. Sauf Castiel qui, adossé au mur restait tourné vers moi, son sourire aux lèvres. Sans le regarder, je demandais:
   - Qu'est-ce-que tu regardes exactement?
   - Je ne m'attendais pas à te revoir ici... Cyrielle.
Je me tournai cette fois vers lui, sourcils froncés et agacée par son comportement.
   - Revoir? Je n'te connais pas, je t'ai jamais vu. Et puis d'où tu connais mon nom?
   - Ne joue pas à ça avec moi, dit-il en étouffant un rire. Je t'ai vu me reluquer tout à l'heure près de la serre et quand l'autre blondinet à braillé ton nom, je me suis douté que c'était le tien. Satisfaite?
   - Te reluquer? Non mais t'es pas sérieux là ?! Ne prends pas tes désirs pour des réalités.
   - Les tiens tu veux dire? répondit-il, taquin.
Je le regardais de haut en bas.
   - Ça y est... Je vois...
   - Tu vois quoi?
   - Je vois quel genre de type tu es.
Il se pencha vers moi.
   - Et quel genre de type je suis?
   - Le genre de petit branleur égocentrique et imbu de sa personne qui est juste assez mignon pour s'attirer toutes les écervelées de ce bahut et d'en tirer satisfaction en entretenant ce mythe de rocker je m'en foutiste et dragueur alors qu'au fond de lui se cache un être probablement incroyablement seul et incapable d'éprouver des sentiments sincères sans que ça lui foute une trouille bleue.
Il resta sans voix.
   - Alors? Satisfait? Ajoutais-je.
Il se ré-adossa au mur et pencha la tête sur le côté tout en continuant de me regarder.
   - Et qu'est-ce qui te fait dire ça? me demanda-t-il.
Cette fois-ci, c'est moi qui me penchai vers lui et me suis également rapprochée de son visage. Il eut un léger mouvement de recul et je lui soufflai:
   - Parce que tu es comme moi.



CHAPTER 3:

La fin du cours de Mr Faraize se passa normalement. Castiel ne broncha plus mais continuait de me regarder de temps en temps, apparemment pas vraiment intéressé par le contenu du cours. Quand la cloche sonna, je pliais bagage et me dirigeais vers la cour. Je fis d'abord un détour par le casier qui m'avait été attribué. Il était en assez bon état mais comme je n'avais pas encore de cadenas pour le verrouiller, je décidais de ne rien y laisser dedans.
J'ouvris la porte menant dehors et je sentis mon humeur se dégrader. La cour pullulait de monde. Des petits groupes de filles piaillaient sur les bancs et les garçons quant à eux jouaient soit au foot, soit au basket. Deux groupes en particulier attiraient mon attention. Enfin, pour dire la vérité, j'attirai plutôt leur attention.
Le premier, dans les yeux desquels je ne détectais pas vraiment d'animosité mais plutôt de l'hésitation et de la curiosité, était composé d'une petite rouquine aux yeux bleus affublée d'un sous-pull vert sous un tee-shirt violet; d'une grande fille aux cheveux blancs irisés interminables dans un uniforme scolaire violet et blanc avec des cuissardes noires et des yeux couleur ambre; d'un garçon au look très particulier style victorien et aux yeux vairons semblant poser nonchalamment pour un magasine tout en me regardant, son menton posé sur le dos sa main; et de deux autres filles plus conventionnels dans leurs accoutrement si ce n'est que l'une d'elle avait les cheveux teints couleur lilas tandis que la seconde avait de long cheveux bruns.

Le second n'était lui composé que de trois filles tout à fait exécrables. Une grande blonde aux yeux turquoises accompagnées derrière elle de deux greluches dont une asiatique occupée à retoucher son rouge à lèvre pour la énième fois et une grande brune au regard dédaigneux. Ces trois-là me regardaient de toute leur hauteur et étouffaient de petits rires moqueurs toutes les 30 secondes. Sans intérêt.
Je m’apprêtais à faire demi-tour et à re-rentrer dans le lycée quand une fille en robe verte, un magnétophone à la main m'attrapa par le bras et me fit me retourner.
   - Salut, tu dois être Cyrielle la nouvelle! Je suis Peggy, la rédactrice en chef du journal de l'école. Tu veux bien être notre sujet du jour pour la première page?
   - Je...
A peine ai-je eu le temps d'ouvrir la bouche que je fus aveuglée par les flashs de son appareil photo.
   - Putaaain... grognais-je en me couvrant les yeux.
   - Alors Cyrielle, une petite interview ça te va? Bien sûr que ça te va! Tu vas répondre aux questions que tout le lycée se pose déjà à ton sujet depuis ton arrivée cet après-midi!
Cette espèce de pie ne me laissait pas en placer une. Le sang commençait à battre dans mes tempes faisant monter un mal de crâne qui me tiraillait la tête.
   - Alors dis-moi, quel âge as-tu? Pourquoi t'as autant de piercings? C'est ta couleur de cheveux naturelle? Tu...
Je levais la main et elle se stoppa:
   - Écoute Peggy. Tu m'as tout l'air d'être le genre de fille qui parle beaucoup. Beaucoup trop à mon goût et comme moi je n'aime pas parler pour ne rien dire et étaler ma vie pour le compte de parfaits inconnus, je vais en rester là et m'abstenir.
Sur quoi,  je me faufilais dans le lycée, laissant derrière moi cette foule de personnes inquisitrices. Je devrais attendre que l'effet "bête de foire" passe mais ça risquait de prendre quelques temps. Mes pas résonnaient dans les couloirs vides et exempts de monde. Le silence. Je cherchais un endroit tranquille pour profiter de ma "récréation". Je montais les deux étages du bahut sans grande conviction et vis une porte entrouverte au fond d'un couloir. Une pancarte triangulaire jaune y était accrochée indiquant:

" Attention, passage strictement interdit aux  élèves "

Si cette porte avait été simplement fermée, j'aurai sûrement passé mon chemin et me serai résolue à fumer ma cigarette dans les toilettes. Seulement... elle n'était pas fermée et je ne pus refuser son invitation à aller découvrir ce qui se cachait derrière. De plus, j'étais certaine que ça allait me plaire.
Je tirais donc la porte et découvris un escalier métallique d'une quinzaine de marches. Je pris soin de refermer la porte derrière moi et entrepris de gravir ces marches dans la pénombre. Je me retrouvais devant une seconde porte métallique. Un mince halo de lumière filtrait sous l'encadrement de celle-ci et je sentais un léger courant d'air. J'appuyais sur la lourde poignée et poussais d'un coup d'épaule la porte dont le mécanisme s'enclencha et résonna. Une brise un peu plus forte balaya ma figure de sa langue froide et me décoiffa. J'avais une vue panoramique sur toute la ville ainsi que sur le lycée. Le sol en gravier crissait sous mes chaussures à mesure que j'avançais. Je souris:
   - Un accès au toit. Héhé, c'est l'endroit rêvé!
J'avançais et en profitais pour allumer ma cigarette. La  fumée que je crachais fut immédiatement emportée par le vent. J'inspirai à pleins poumons et commençais à me détendre quand j'entendis un bruit sur ma gauche. Le gravier. Et je ne bougeais plus. Il s'agissait forcément de quelqu'un d'autre.
   - Y A QUELQU'UN?
Pas de réponse. Je fis quelques pas devant moi. Les cachettes possibles étaient peu nombreuses ici. Quelques bouches d'aération poussaient çà et là comme de gros champignons et auraient pu faire l'affaire aussi j'entrepris de faire le tour de la plus proche.
Nouveau crissement de gravier. Je me précipitais pour regarder derrière et il y eut un bruit de chute suivit d'un: Aïe! Je me trouvais face à quelqu'un étalé par terre, tombé en essayant de prendre la fuite et cette personne n'était autre que:
   - Castiel...
Il se retourna, les yeux ronds.
   - Ha! S’exclama-t-il. C'est toi?!
Et il se laissa retomber par terre en soupirant de soulagement.
   - J'ai cru que c'était un prof ou la Directrice!
Je lui tendis la main pour l'aider à se relever.
   - Navrée de te décevoir, ce n'est que moi.
   - Tu parles! Heureusement que c'est toi et pas eux! J'me serais encore fait démonter sinon!
Il épousseta sa veste et son pantalon puis ajouta:
   - Le problème maintenant, c'est que j'ai jeté ma clope par-dessus le toit de peur de m'faire gauler...
Il fixait ma main dans laquelle se trouvait ma cigarette.
   - Halala, soupirais-je. Tiens, pauvre petit.
  - Hahaha, merci! répondit-il joyeusement en se saisissant et en tirant sur "feu" ma clope.
Je m'assis par terre et m'en allumais une nouvelle.
   - C'est pas la première fois que tu squattes ici donc?
   - Non. Par contre c'est la première fois que j'y trouve quelqu'un d'autre que moi.
Il s'assit à mes côtés.
   - T'avais mal fermé la porte, répondis-je.
   - Ha, faudra que je fasse plus attention la prochaine fois.
Un court silence s'installa avant qu'il ne le rompe à nouveau:
   - Pourquoi t'es pas en bas avec les autres?
Je pris un petit moment de réflexion avant de répondre:
   - J'aime pas beaucoup les gens.
   - ... C'est-à-dire?
   - C'est à dire que je ne les aime pas beaucoup. Ça vaut pour tout le monde, les gens de ce lycée ne sont pas les seuls concernés, je te rassure.
   - Je sais pas si c'est vraiment rassurant, fit-il en se tournant vers moi.
Je tournais juste les yeux pour l'observer puis replongeais mon regard devant moi, vers l'horizon.
   - C'est très compliqué pour moi de me faire à tout ce monde.
   - T’exagères...
   - Non, vraiment pas. C'est maladif chez moi, je n'arrive pas à me lier aux gens, même de la plus simple façon qui soit.
   - Pourtant, t'es bien en train de me parler là, non? Et ça n’a pas l'air de te poser tant de problèmes que ça.
Sa phrase me fit sourire, il avait un sourire étiré jusqu'aux oreilles et il me bouscula.
   - C'est pas la question, répondis-je en le bousculant à mon tour. Je préfère rester à l'écart quand c'est possible, d'ailleurs si j'avais pu être seule sur ce toit pendant ma pause, ça m'aurait arrangé...
Il fronça les sourcils.
   - Hé ben, qu'est ce qui t'empêche de prendre des cours par correspondance? Tu resterais chez toi, et tu ne serais pas ici à te plaindre.
   - Je ne peux pas.
   - Pourquoi? Tes parents veulent pas?
Aïe. Sujet qui fâche.
   -  Je n'ai pas de parents.
   - Oh, désolé, fit-il, gêné. Ils sont... décédés?
   - Non. Mais c'est tout comme. La personne qui m'élevait et que je considérais comme ma seule famille est morte récemment, répondis-je, impassible.
Il n'ajouta rien, et se contenta de regarder ses pieds.
   - Je vis seule désormais dans la maison qu'elle m'a laissé après son décès, je suis majeure et émancipée mais pour autant, je n'ai pas le droit de faire ce que je veux.
   - Hahaha, oui je connais bien ça! Sourit-il. Moi aussi j'suis émancipé.
 Je le regardais, ma question devait se lire dans mes yeux.
   - Mes parents sont constamment en déplacement, c'était plus facile pour moi de faire cette demande il y a deux ans. Ça ne les a pas embêté du tout, ils roulent plus ou moins sur l'or et du coup j'ai "hérité" de la maison familiale bien qu'ils continuent à payer impôts, charges et mes divers frais jusqu'à ce que je me trouve un boulot "décent". J'aurai préféré qu'ils me foutent la paix mais ma mère est une plaie, elle obtient toujours ce qu'elle veut. Ça doit être de famille...
   - Mouais, marmonnais-je. Ce qui m'empêche de tourner en rond vient de "bien plus haut" à vrai dire.
   - Quoi?! DIEU?! S’amusa-t-il.
   - Mais non, dis pas de conneries.
   - Qui alors?
   - ... Ça, je ne risque pas de te le dire.
   - Et pourquoi pas?
   - Parce que je me rends compte que j'en ai déjà trop dit alors que je ne te connais que depuis quelques heures et qu'à la base, tu m'as fait une très mauvaise première impression tout à l'heure en cours.
   - Tout le monde peut se tromper! répondit-il en se relevant.
Il me tendit la main, je la saisi et me mis sur mes deux jambes. Cependant il ne lâcha pas ma main pour autant et me tira violemment vers lui. Il  plongea ses pupilles grises dans les miennes et ajouta:
   - Et toi tu m'intrigues. Tu finiras par répondre à mes questions, ça je t'en donne ma parole.
   - Tu es bien sûr de toi je trouve, lui dis-je en fronçant les sourcils.
   - Et ça m'a toujours réussi, tu l'apprendras vite. N'importe qui te le diras.
Je me défis de sa poigne et lui répondis:
   - Et toi tu apprendras vite que je ne suis pas n'importe qui.
   - Ça, fit il en prenant une mèche de mes cheveux entre ses doigts, je le sais déjà.
Je chassais ses doigts d'un revers de la main. Il commença à s'éloigner vers la porte au moment où la sonnerie retentit, annonçant la reprise des cours. Je le suivis, nous redescendîmes et nous attendîmes tous les deux ensembles devant la porte de la salle de notre prochain cours. Les gens circulaient à nouveau dans les couloirs et nous regardaient en passant. Les filles murmuraient en voyant Castiel à mes côtés. Je n'y prêtai pas attention si bien que je ne vis pas la grande blonde me fusiller du regard sur son passage.


CHAPTER 4:

Pendant que je regardais mes pieds en attendant que le prof daigne bien se montrer pour notre prochain cours, l'air fut tout à coup envahi par une odeur forte de fleurs. Je relevais la tête et vis la blonde de tout à l'heure se diriger vers nous, ses cheveux se mouvant derrière elle à mesure qu'elle avançait. Elle se rapprocha puis trébucha pour s'écrouler sur Castiel à côté dé moi. Celui-ci la rattrapa d'un bras et la releva:
   - Ça va? demanda-t-il pour la forme, le ton employé témoignant d'un désintérêt certain pour elle.
Elle s'engouffra alors contre son torse.
   - Heureusement que tu m'as rattrapé! Je me serai cassée la cheville, tu imagines? Le jour de la rentrée?
Il soupira longuement:
   - Ouais ouais, ça aurait été affreux...
Je regardais la scène qui se déroulait à côté de moi et je ne pus m'empêcher de la trouver à la fois comique mais en même temps assez étrange. En fait, j'aurai pu jurer que la petite princesse avait fait exprès de tomber. Mais bon, pas de médisance, ça peut arriver à tout le monde un peu de maladresse. Ce qui ne me surpris pas, c'était l'évidente attirance de cette fille pour Castiel et le fait qu'il, comme je l'avais deviné, n'en avait strictement rien à faire.
   - Tu vas rester là encore longtemps? demanda-t-il. T'as pas cours?
   - Si, fit elle toujours blottie contre lui.
   - Alors qu'est-c'que tu fous encore là?!
   - Je préfère rester avec toi.
Cette fois, il l'attrapa par les épaules et la fit se déloger.
   - Ambre, va en cours.
   - Mais Castiel... minauda-t-elle.
   - T'es gonflante, si ton frère nous croise tout les deux, c'est encore moi qu'il enverra devant la dirlo pour tes conneries. Va en cours j'te dis!
Alors le visage d'Ambre changea. La petite princesse implorante céda sa place à une jeune ado hautaine et vexée. Elle fulminait.
   - Qu'est-c'que j'en ai à foutre de Nathaniel ou de ce qu'il pourrait faire? Tu vas me rejeter encore longtemps?? Je suis la fille la plus canon et la plus populaire de ce foutu bahut et tu vas me dire que t'en as rien à faire des avances que je te fais à longueur de temps?
Il leva les yeux au ciel.
   - Je fais pas dans le détournement de mineure, désolé, lâcha-t-il sans plus de tact.
   - Pardon?! cracha-t-elle. T'es à peine majeur! J'ai juste un an de moins que toi et t'es déjà sorti avec des filles de mon âge avant ta majorité!
   - J'ai pas envie d'avoir affaire à toi ou à ta famille, ok? J'suis sympa avec toi parce que t'es la sœur du DP mais ça s'arrête là, il serait temps que tu le comprennes.
Un sourire se dessina sur mon visage, la scène était vraiment coquasse tellement elle calquait ce que je venais de dire de Castiel une heure auparavant. Ambre remarqua mon sourire et me lança un regard noir:
   - Qu'est-c'qui te fait rire toi, espèce de punk?!
   - Ta bêtise.
Elle se dirigea vers moi et attrapa le col de mon perfecto. Malgré son jeune âge, avec ses escarpins, elle faisait facilement ma taille et planta ses pupilles turquoises dans mes yeux.
   - Joue pas avec moi la Nouvelle. Fais le moindre truc pour me contrarier et je te jure que je vais faire de ta vie un enfer dans ce lycée, menaça-t-elle.
Je saisi son poignet et la fit lâcher prise.
   - On parie? Répondis-je en la toisant.
Elle se libéra de ma poigne et m'insulta avant de décamper. Je remis en place le col de mon perfecto et mes mains dans mes poches quand j'entendis un rire à côté de moi.
   - Cette année risque d'être intéressante, pouffa-t-il.
Le reste de la classe arriva petit à petit et un attroupement de filles se forma autour de Castiel. Il resta cependant de marbre pendant qu'elles le flattaient, décochant quelques sourires de temps en temps, il les laissait se prendre en photo avec lui à l'aide de leurs téléphones et à la moindre petite attention de sa part envers ses courtisanes, ces dernières viraient au rouge pivoine ce qui avait le don de le faire alors encore plus rigoler. Ce petit jeu lui plaisait malgré ses démentis de tout à l'heure. Je secouai la tête. Décidément, ce mec s'annonçait irrécupérable.
La fin de la journée se passa sans encombre. Je me retrouvais constamment à côté de Castiel en cours vu qu'apparemment les filles étaient trop timides ou impressionnées pour oser l'approcher; quant aux mecs, peu d'entre eux avaient l'air de le porter dans leur cœur, le succès suscitant la jalousie je supposais. Cependant, malgré les incessantes questions qu'il me posait, je décidais que j'en avais suffisamment dit sur moi pour le mois à venir du coup, je restais silencieuse et ne décochais pas un mot avant la prochaine sonnerie annonçant la fin des cours. A 17h je rangeais donc mes affaires dans mon sac et sortis de la salle de classe, Castiel derrière moi. J'entendais des filles chuchoter son prénom sur son passage dans les couloirs.
Une fois dehors, je remis ma capuche et avançais dans le froid de la fin d’après-midi, au milieu de la foule qui s'empressait de quitter l'établissement. Au moment de franchir le portail, quelqu'un me poussa violemment dans le dos. Je n'eus pas le temps de me retourner pour voir qui avait intentionnellement essayé de me faire tomber que je fus entraînée par le flux de personnes vers la sortie. Une fois dehors, campée sur mes pieds, je cherchais autour de moi quelqu'un en train de rire ou autre mais ne vis personne de suspect.
   - Bande de cons.

Je marchais pendant 25 minutes pour rejoindre ma maison.
J'ouvris le petit portail en fer forgé et marchais dans les broussailles du terrain vague qui me servait de jardin. Je montais les quelques marches en bois menant à la porte d'entrée et y introduis ma clé. Un aboiement retentit dans le salon. Un boxer blanc comme la neige déboula et s'engouffra dans mes jambes en aboyant bruyamment.
   - Oui Trigger, c'est moi.
Mon chien sortit alors sur le perron et tendit le cou en humant l'air, cherchant à droite, à gauche en haletant.
    - Viens mon beau, rentre...
Il trottina dans la maison et je refermais la porte derrière lui. Je savais très bien qui il attendait si impatiemment chaque jour sur le pas de la porte. Il l'attendait, Elle. Il s'attendait à La voir rentrer avec moi, toujours persuadé qu'Elle n'était pas partie définitivement. La fidélité de cet animal n'allait pas m'aider à faire mon deuil, le sien n'ayant même pas commencé, mais c'était tant mieux pour lui. Il finirait peut-être par L'oublier et n'aurait pas à supporter toute la tristesse que moi je devais endurer. Trigger s'assit à côté de sa gamelle, la bouche ouverte, la langue pendante. J'allais lui chercher ses croquettes et en déposais une bonne quantité. Pendant qu'il engloutissait son repas, j'en profitais pour changer son eau et m'étaler ensuite sur le canapé, mon bras posé sur mon front. Je fixais le plafond orné de tâches d'humidité. Par endroit, le plâtre commençait à se décoller. La maison était certes grande, mais elle n'était pas en très bon état. Je me demandais alors si je trouverai la force pour entreprendre tous les travaux que Nous voulions faire maintenant que j'étais seule.
   - A quoi bon, murmurais-je.
Je penchais la tête sur le côté et vis la table basse démembrée sur le tapis, exempt de la plaque en verre qui la recouvrait. Je l'avais retrouvé brisée à mon retour cette fameuse nuit. Je devrai aussi remplacer ça si je souhaitais pouvoir reposer des choses dessus. Et puis il y avait cette tâche. Cette tâche noirâtre. Celle qui ne voulait pas partir, malgré tous mes efforts et qui, même si elle ne se propageait plus sur mon tapis, continuait à me nécroser de l'intérieur, pourrissant mon cœur et mes tripes, me rappelant chaque jour cette perte et cette solitude atroce à laquelle je me retrouvais confrontée malgré moi. Ma gorge commença à se serrer, je fermais les yeux puis j'entendis un gémissement. Je rouvris les yeux et regardais mes jambes sur lesquelles je sentis soudain un poids. Trigger venait de poser sa tête sur ma cuisse et me regardait avec ses yeux tristes, et ses babines tombantes.
Je lui frottais le crâne et lui grattais les oreilles:
   - Ça va mon beau, ne t'inquiètes pas.
Je me redressais et pris sa tête entre mes mains.
   - Ça te dit une ballade?
J'attrapais sa laisse qui était posée par terre et au tintement qu'elle émit Trigger bondit sur ses pattes et jappa de joie. Il tourna autour de moi pendant que je marchais vers la porte d'entrée. Je saisis mes clés, crochetais la laisse au collier de Trigger et sortis.

Trigger marchant à mes côtés, je me dirigeais vers l'océan. Il aimait se baigner et quant à moi, le son des vagues m'apaisait. De plus, j'avais la chance de vivre dans une ville côtière où la mer n'était qu'à quelques minutes de chez moi. Au fur et à mesure que mes pas me menaient vers ma destination, l'air fut saturé d'iode et une brise humide commença à souffler. Inconsciemment, je tournais la tête sur ma route pour regarder la falaise où je L'avais finalement laissé partir, où j'avais laissé mes souvenirs et ma peine s'envoler... Du moins, j'avais essayé.
Je traversais la route et me dirigeais vers la pente rocheuse et escarpée qui me menait à la petite crique où j'aimais tant aller. Je détachais la laisse de mon chien pour qu'il puisse descendre librement vers la plage avant moi. Il connaissait le chemin pour y être allé souvent. J'entrepris ma descente avec précaution et avant de faire mes derniers pas, je retirais mes chaussures et mes chaussettes et posais finalement mes pieds sur le sable fin. Trigger aboya bruyamment, je levais la tête et le vis accourir vers moi, un morceau de bois flotté entre les dents.

Il le posa à mes pieds et s'ébroua: 
   - Oh, Trigger, t'es trempé! Fis-je en me protégeant le visage des gouttes d'eau salée et du sable collé à ses poils.
Il aboya à nouveau, en me regardant puis en regardant son bout de bois.
   - Ok, j'ai compris.
Je me saisis du bâton et commençais à le secouer devant lui.
   - Tu veux jouer? C'est ça que tu veux?
Comme pour acquiescer, il jappa et se pencha en avant tout en gardant son postérieur levé, prêt à bondir. Je lançais le bâton aussi loin que possible, et quand celui-ci atterrit dans l'eau, Trigger se précipita à sa suite et commença à nager pour le récupérer. Ce ne fut pas difficile, il le récupéra bien vite et je dus répéter l'opération plusieurs fois.
Mon bras commençant à montrer des signes de fatigue, je m'assis lourdement sur le sable et expirais profondément. Trigger trottina dans ma direction, haletant et finit par s'allonger près de moi. Je lui frottais le dos en regardant l'océan et les vagues qui allaient et venaient paisiblement, léchant le rivage. Mes poumons gonflés d'oxygène, j'écoutais mon cœur battre au rythme du ressac. Il cognait dans ma poitrine. Je fermais les yeux et je me suis soudain sentie envahie par ce son régulier, la musique que murmurait la mer s'estompa petit à petit laissant la place aux battements de mon cœur. Ces derniers devinrent de plus en plus oppressants et intenses si bien que je n'entendais plus rien que leur son, cognant dans mon crâne. Je le sentais s'emballer, je voyais mes entrailles se tordre en pensant à ma situation. J'entourais mes jambes de mes bras et posais mon menton sur mes genoux, les paupières plissées à m'en donner mal à la tête. Mes dents serrées, je pestais:                                                          
   - Pourquoi ça m'arrive à moi. Pourquoi, pourquoi, pourquoi...
Je grelottais, le vent était froid et s'engouffrait sous mes vêtements. Je resserrais mon étreinte et malgré la proximité de Trigger, je me sentais désespérément gelée, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Froide et seule. Isolée.
   - J'aurais aimé... J'aurais... tant aimé...
Des larmes montèrent alors et commencèrent à perler le long de mes joues, dégringolant sur mon visage déformé par la douleur, traçant des sillons invisibles et creusant des crevasses que personne ne verrait jamais.
   - J'aurai tant aimé que tu sois encore là... Tu me manques... me... manques tellement...
Les mots qui sortaient de ma bouche n'en étaient plus vraiment car en vérité, je n'arrivais tout simplement plus à articuler. Elle me manquait à un point impossible à imaginer. Son absence m'était insupportable, Elle avait laissé un trou béant dans ma poitrine que je n'arriverai jamais à combler. Jamais. Je pleurais. Je ne pouvais que pleurer. Je ne voulais pas rentrer, je ne voulais pas affronter cette réalité dégueulasse que je n'assumais qu'en apparence.
Un vent doux souffla contre mon dos et m'enveloppa. J'entendis un murmure à mon oreille et soudain mon corps se réchauffa, empli de sérénité, c'était comme si on m'entourait d'une étreinte chaleureuse. Comme si Elle était apparue derrière moi, s'était accroupie et qu'Elle m'étreignait de toute sa tendresse, comme Elle le faisait pour me réconforter quand je rentrais contrariée du boulot et que je me "réfugiais" sur notre toit, là où nous passions de longues heures et d'agréables nuit à parler, boire et oublier nos soucis. C'était nos moments à nous, privilégiés... Et jamais plus je ne serai à même de les revivre.
   "Cyrielle..."
J'ouvris grand les yeux à l'entente de mon prénom; sortie de ma bulle, les yeux irrités, je tournais brusquement la tête à gauche puis à droite et me figeais. La cadence des vagues avait repris, susurrant de doux murmures à mes oreilles mais la seule chose que je vis en face de moi en dehors des rochers gris anthracite et de la mer s'étendant à perte de vue, fut Trigger. Il s'était assis et me regardait attentivement, la tête penchée. Il gémissait, une longue plainte d'une tristesse déchirante émanait de lui et ses yeux étaient plantés dans les miens comme si... il avait compris. Mon imagination avait changé le gémissement d'un chien, le mouvement des vagues et le son du vent en un appel d'espoir fou auquel j'avais cru. J'ai cru qu'Elle était revenue. Qu'Elle m'était revenue.
   - Ha... haha... hahaha...
Je me mis à rire sans me contrôler puis éclatais à nouveau en sanglot, pathétique et brisée. Trigger se rapprocha et se colla à moi. Je l'enlaçais sans contenir ma force et le serrais en épongeant mes pleurs dans son pelage. Mes larmes salées se mêlant à l'humidité de la mer dont il était encore imprégné.
   - Ne me laisse pas...
Il n'opposa aucune résistance et cet animal que l'on dit trop souvent à tort "sans âme" fut le seul à me soutenir de ses épaules frêles, le seul qui sans dire un mot m'exprima et me donna tout l'amour qui me manquait en cet instant.