CHAPTER 9

Je sortis péniblement de mon sommeil et m'étirais de tout mon long. Je tâtonnais du pied le bas de mon lit et ne sentis pas la présence de Trigger. Il avait dû sortir se coucher dans son panier durant la nuit. Je me frottais les yeux et tournais la tête vers mon réveil. 
7:13. 
Comme d'habitude, je me réveillais avant que ce dernier ne sonne. 
Je m'assis sur le bord de mon lit, attrapais une pince dans le tiroir le plus proche et attachais mes cheveux avant de traîner des pieds vers ma salle de bain. J'aspergeais mon visage d'eau glacée et le savonnais avant de me regarder dans la glace:
   - ... Ça pourrait être pire, me dis-je en faisant la moue.
Je me félicitais de ne pas avoir abusé sur l'alcool hier et songeais à l'énergumène que j'entendais ronfler dans le salon et qui squattait mon canapé. Je pris une douche rapide et enfilais un collant résille et un slim noir déchiré. Tout en agrafant mon soutien-gorge, je parcourais ma commode du regard pour choisir un haut. Je jetais finalement mon dévolu sur un tee-shirt découpé des Misfits qu'Elle avait bien voulu me faire et attrapais un sweat zippé gris que je mis par dessus, voyant par la fenêtre que le temps ne me permettrait pas de me balader simplement en débardeur et  perfecto sans choper une angine. En entendant l'agitation de mon réveil dans ma chambre, Trigger arriva en trottinant et en haletant, la langue pendante:
   - Bien dormi mon beau?
Il émit un aboiement tonitruant et je me crispais quand celui-ci résonna dans la maison. Je mis mon doigt sur ma bouche et lui intimais de se taire. Il me fixa, l'air heureux, remuant ses petites fesses. Je passais ma tête par la porte de ma chambre et jetais un œil en direction du salon. Castiel ne ronflait plus mais il n'avait pas l'air d'avoir entendu quoique ce soit. Je fis chauffer la cafetière et griller quelques tranches de pain. Accoudée au bar, je portais mon mug fumant à ma bouche et bu une gorgée réconfortante de caféine. J'ouvris le plus silencieusement possible la porte d'entrée et laissais sortir mon compagnon à quatre pattes dans le jardin. En la refermant, j'entendis que mon invité avait recommencé à ronfler. Il allait bientôt falloir qu'on parte pour le lycée, aussi je me dirigeais vers le canapé. Surplombant Castiel, une idée me vînt à l'esprit et je me mis à sourire. Je pris une nouvelle gorgée de café et de ma main libre... Je lui bouchais le nez. Les ronflements cessèrent. Puis il fronça les sourcils, commença à changer de couleur et enfin il jeta violemment ses bras devant lui pour que je retire ma main en prenant une grande inspiration. Le plaid qui le recouvrait jusqu'alors glissa sur le sol, dévoilant son torse nu:
   - T'es pas bien?! Hurla-t-il. Tu voulais que j'm'étouffe?!
   - Du calme, c'était pour rire, répondis-je en souriant.
C'était tout ce à quoi je m'attendais:
   - Allez, remue toi, on va pas tarder à aller en cours, si tu veux avoir le temps de prendre une douche...
Il mit ses mains sur son visage et grommela quelque chose d'incompréhensible. Je saisis son tee-shirt sur le sol et lui envoyais à la figure:
   - Bouge toi. J'ai pas envie d'être en retard et il est hors de question que tu restes seul chez moi toute la journée.
Il l'enfila et retroussa ses manches avant de me lancer un regard noir:
   - Tu m'le paieras Redfield.
   - C'est ce qu'ils disent tous, ajoutais-je en me retournant vers le bar. Va te doucher ou au moins te rincer la bouche, tu refoules la Tequila.
Il se jeta sur mes épaules et colla son visage au mien:
   - J'me doucherai dans les vestiaires du lycée pendant mes heures au club de basket, comme ça tu auras le plaisir de supporter mon odeur musquée d'homme viril pendant tout le trajet vers le bahut.
   - De poivrot tu veux dire?
Je repoussais son visage du plat de la main et il marcha vers l'évier de la cuisine tout en s'étirant pour se rincer le visage et la bouche:
   - Putain, soupira-t-il. On a beaucoup picolé hier? J'ai un sacré mal de crâne...
   - Tu n'y es pas allé de main morte, répondis-je pendant qu'il se servait un café et croquait dans une des tartine.
   - Mouais, j'me souviens de deux trois trucs mais pas comment j'ai atterri sur le canapé par exemple.
  - J't'ai descendu quand j'ai estimé qu'on avait assez joué... et tant que tu tenais encore sur tes jambes. J'avoue que j'ai hésité un moment entre t'aider à redescendre et te jeter par dessus le toit mais bon...
   - Ha, ha, ha, très drôle, grogna-t-il la bouche pleine. Merci en tout cas.
   - Pas de quoi.
Il y eut un court silence où nous nous sommes regardés l'un l'autre avant qu'il n'ajoute:
   - Donc... toi et une autre nana vous avez déjà...
   - C'est l'heure de partir, le coupais-je en me saisissant de son mug et le mettant avec le mien dans l'évier. 
Il ria et finit sa tartine de pain avant d'enfiler sa veste, ses chaussures et d'attraper son sac. Il en profita pour décrocher la pince que j'avais dans les cheveux jusqu'alors et attacher les siens avec, comme si de rien n'était. Je le jaugeais un court instant puis finis par enfiler mon perfecto en soupirant faiblement. J'avais bien assez d'accessoires pour attacher mes cheveux chez moi, je pouvais donc me passer de cette pauvre pince en plastique noire et la lui prêter le temps d'une journée. Il me précéda et nous sortîmes de la maison. Je sifflais Trigger qui arriva sur le perron et après une caresse vigoureuse sur sa tête, je le fis entrer et fermais la porte à clé.

Comme nous n'étions pas en avance et que Castiel était, selon ses propres mots, "trop déchiré" pour faire la route à pied, je consenti à prendre le bus. J'étais du genre à préférer me déplacer d'un point A à un point B en évitant les transports en commun tant que c'était humainement possible. Je me rappelais bien vite pourquoi: le bus bondé à cette heure matinale d'adolescents, de jeunes étudiants bruyants et de travailleurs somnolents me fit suffoquer et me recroqueviller intérieurement sur moi-même. Je payais mon ticket de bus et rentrais mes épaules pour me frayer un chemin au milieu de cette foule puante et compacte.
Aucune place n'était disponible aussi Castiel et moi nous sommes accrochés aux poignées de soutien du plafond encore restantes. Je fouillais mon sac à l'aveuglette et en sorti mes écouteurs que j'enfilais ainsi que mon lecteur mp3 que je mis en marche. Une musique calme pour m'aider à ne pas songer au manque d'espace vital que je ressentais. [ ♪ Listen ♫ ] Du coin de l'œil , je vis bien vite Castiel dodeliner et s'assoupir, sa tête appuyée contre son bras.
   - La journée s'annonce bien, pensais-je en le regardant, heureusement qu'on est vendredi.
 Je fis le tour du bus du regard et reconnu quelques visages: les deux acolytes d'Ambre étaient assises côte à côte et jacassaient  avec leur voisine devant elles qui était à genoux sur son siège pour leurs faire face. C'était une rouquine qui portait un serre-tête rose fleuri de la même couleur que sa  robe et une veste bleu jean. Le son dans mes oreilles m'empêchait de saisir le sujet de leur discussion mais à en juger par leurs gestuelles et  leurs grimaces exagérées, je compris qu'elles se moquaient certainement d'élèves du lycée. Non loin d'elles, Peggy était à l'écoute de la moindre conversation, se penchant en avant de temps en temps pour récolter ses informations. Cependant, je trouvais que son regard s'attardait un peu trop souvent sur moi et que son crayon griffonnait beaucoup trop son bloc-notes. Je finis par l'ignorer tout le restant du trajet. La dernière personne que je remarquais fut le garçon aux cheveux argentés, assis au fond du bus, qui regardait  défiler le paysage accoudé au rebord de la fenêtre. Il tourna la tête et posa ses yeux bicolores sur moi un bref instant puis je me sentie propulsée en avant.
Un bruit strident retentit et, déséquilibrée, je lâchais la poignée que je tenais fermement jusqu'alors et m'agrippais au buste de Castiel qui entoura ma taille de son bras libre et me tînt contre lui le temps que le véhicule se stabilise. Un de mes écouteurs s'était décroché et je pus entendre le chauffeur du bus insulter un piéton qui, à l'évidence, était responsable de ce violent coup de frein. Les gens regardaient en direction de l'avant du bus et beaucoup se mirent à râler avant de retourner à leurs occupations. Castiel finit par détourner son visage de la route tandis que le bus redémarrait et il posa son menton sur le haut de mon crâne en soupirant:
   - Haaa Cyrielle, fit-il ravi, je savais que tu finirais par trouver une excuse pour te jeter sur moi.
Ma réaction fût instantanée et j'éclatais tout simplement de rire. Il riait lui aussi de sa petite vanne et retira son bras de ma taille sans que j'ai eu besoin de lui demander quoique ce soit puis il reprit sa position initiale et continua son petit somme en souriant. Moi je remis mon écouteur en place et jetais à nouveau un coup d’œil à l'arrière du bus pour voir le garçon de tout à l'heure regarder dans notre direction et sourire avec sympathie. Je lui rendis son sourire en lui faisant un furtif signe de la main et il me répondit d'un hochement de tête avant de retourner à sa silencieuse contemplation.
Quand le bus arriva enfin à destination, je rangeais mon lecteur et enfournais une cigarette dans ma bouche avant de sortir, bousculée par les autres passagers. Je l'allumais une fois sortie et Castiel en fit autant avant d'être interpelé par une voix derrière nous:
   - Toujours pas décidé à arrêter cette cochonnerie?
   - Woooooooh, cria Castiel en se jetant dans les bras de son ami. Lysandre mon poooote!
   - Hm , grogna-t-il, c'est pas la seule chose dont tu ais abusé j'ai l'impression...
Il repoussa légèrement Castiel mais celui-ci s'appuya encore plus de tout son poids sur Lysandre qui leva les yeux au ciel.
   - Mais c'est Cyrielle qui m'a piégé hier soir, geigna-t-il, et elle a pas voulu me laisser dormir ce matin!
   - Elle a bien fait. Cyrielle donc?
Il s'adressa à moi en me tendant une de ses mains:
   - Je suis Lysandre, je ne crois pas qu'on ait eu l'occasion de se présenter.
Je remis ma cigarette dans ma bouche et lui serrait la main.
   - Exact, je ne suis là que depuis quelques jours faut dire, lui répondis-je. Oh et je décline toute responsabilités quant à l'état de la loque avachie contre toi.
   - Ne t'en fais pas. Il est assez grand pour prendre ses propres décisions, ça je le sais, et il a l'air d'avoir apprécié ce qui l'a mené dans cet état à voir son sourire béat.
Castiel se redressa brusquement et failli perdre l'équilibre:
   - Gnnnn... J'aurais peut-être dû rester couché...
   - Et cette cigarette ne doit pas t'aider à décuver si tu veux mon avis, intervint Lysandre en croisant les bras. On devrait peut-être l'emmener à l'infirmerie, qu'en dis-tu?
   - C'est toi le boss, répondis-je en haussant les épaules et en écrasant mon mégot au sol.
   - Ce sera plus prudent, finit-il par admettre.
Lysandre entoura ses épaules du bras de Castiel et tendit le sac de ce dernier pour que je le transporte. Nous suivions la foule d'élèves qui entrait dans l'enceinte du lycée quand Lysandre se pencha vers moi:
   - On ferait mieux de passer par la cour et non par les couloirs pour aller à l'infirmerie. Si on pouvait éviter de croiser la Directrice en chemin, ça lui épargnerait, à lui comme à nous, des sermons interminables.
   - Je suis d'accord. Je te suis.
Il me guida alors au milieu des élèves vers une porte battante qui nous fit passer par le réfectoire encore vide et une série de couloirs et d'escaliers plus ou moins remplis. La porte de l'infirmerie apparue enfin et quand on la franchit, Castiel terminait tout juste le refrain d'une chanson grivoise qu'il avait chantonné tout au long du trajet.
   - Eh bien qui voilà donc! Lysandre, Castiel et plus étonnant encore, notre petite Cyrielle.
   - Bonjour Daphnée, répondit Lysandre en se débarrassant de son encombrant ami.
   - Saaaluuuuuut Nounouuuu! Cria Castiel en se jetant sur l'infirmière qui l'attrapa par le col de sa veste d'un geste habile et le flanqua sur un des lits présents dans la pièce.
   - Hoooo, expira-t-il la tête enfoncée dans un coussin, lit moelleux, merveilleuse invention de l'homme, comme je t'aime à cet instant!
Daphnée secoua la tête, amusée, et tira un des rideaux blancs qui séparait les trois lits. Elle souffla:
   - Hé ben il est en forme!
   - C'est peu de le dire, admis-je tout en rendant son sac à Lysandre.
   - Je croyais que je l'avais missionné de s'occuper de toi durant ta convalescence?
   - Je t'avais dit que ce n'était pas une bonne idée...
Elle ria et alla s'asseoir derrière son bureau:
   - Comment va ta main dis moi?
   - On fait aller.
Je déployais légèrement mes doigts bandés mais ils étaient encore douloureux. Daphnée me dit de ne pas insister et fouilla dans un de ses tiroirs pour en sortir une petite feuille de papier rose:
   - Je vais vous faire un mot pour Monsieur Castiel. Vous n'aurez qu'à le présenter à votre professeur pour l'excuser de son absence et de votre petit retard.
Elle signa le papier et le tendit à Lysandre qui le saisit délicatement.
   - Merci pour lui, fit-il.
Daphnée se releva en lui adressant un sourire et me fit signe de la suivre:
   - Je vais vérifier ta main si tu veux bien et en profiter pour changer ton bandage.
Je jetais un coup d’œil à Lysandre et il secoua le petit papier rose pour me faire comprendre qu'il m'attendrait et de ne pas m'inquiéter. Je laissais donc Daphnée faire son travail et m'ausculter avant d'aller en cours:
   - Alors, comment s'est passée cette fameuse journée avec le phénomène? me demanda-t-elle en indiquant le lit occupé par mon camarade.
   - Plutôt bien je dois l'avouer. Il a insisté pour venir chez moi hier soir pour s'occuper de mon repas. Je l'ai remercié en lui offrant un digestif qui a duré longtemps.
Daphnée me regarda et pouffa:
   - C'est donc ça qui l'a mis dans son état? Je comprends mieux. Il n'a pas été trop grossier?
La sonnerie retentit:
   - Non, non... Il a fait la connaissance de mon chien, de mon canapé et de quelques moments de ma vie mais je pense qu'il ne doit pas se souvenir de grand chose au final donc ça m'arrange.
Daphnée finit de fixer mon bandage tout neuf avec un bout de sparadrap et me tînt la main quelques secondes:
   - Tu sais Cyrielle... Je le connais bien ce garçon. Depuis très longtemps. Et sous ses airs de Don Juan, c'est quelqu'un de bien. Lysandre te le dira et je trouve que vous vous ressemblez beaucoup tous les deux.
Je retirais ma main et ajoutais:
   - Où tu veux en venir?
Elle se releva et mit les siennes dans les poches de sa blouse:
   - Disons que j'aime cette impression que vous me donnez, malgré le fait que vous ne vous connaissiez que depuis quelques jours, que vous pouvez compter l'un sur l'autre. Oui, c'est une analyse peut-être hâtive mais je sais que, mine de rien, vous vous entendez et vous vous entendrez de mieux en mieux avec le temps...
Elle fit une pause dans son discours et j'en profitais pour récupérer mon sac que j'avais posé près de l'entrée:
   - Mais Castiel c'est un peu comme mon petit frère. Et je ne permettrais pas qu'il fasse deux fois la même erreur et qu'il se fasse avoir à nouveau. Par qui que ce soit. J'ai assez donné et je n'ai pas l'intention de ramasser les morceaux une nouvelle fois.
Daphnée avait été claire. Elle protégeait Castiel qu'elle connaissait, à l'entendre, depuis plus longtemps que quelques courtes années scolaires et le message était simple: elle ne permettrait à personne de lui faire du mal. Mais pourquoi me dire ça à moi et maintenant? Je n'appréciais pas particulièrement Castiel et je le supportais plus qu'autre chose. Je n'appréciais pas non plus qu'on me fasse passer pour une saleté. Pourquoi me le mettre dans les pattes si c'était pour sous-entendre dès le lendemain que ça ne lui plaisait pas:
   - Tu sais Daphnée, ce n'est pas moi qui le colle depuis que je suis arrivée à Sweet Amoris. Je n'ai pas non plus demandé à ce qu'il squatte chez moi, ça c'était ton idée de génie. Pourtant sa présence ne m'est pas désagréable. A vrai dire, c'est le seul depuis ma rentrée à vraiment avoir cherché à me parler et me connaître, même si ses méthodes étaient un peu... Grossières, oui et qu'il insiste lourdement pour s'imposer. Je ne suis pas la dernière des idiotes, je cerne assez bien les gens moi aussi comme j'ai pu deviner aujourd'hui que Lysandre est quelqu'un qui me semble de confiance et qu'il sert de garde-fou à l'autre tomate. Mais toi tu te trompes à mon sujet. Je ne fais de mal à personne volontairement, contrairement à certains dans ce lycée qui ont l'air d'y prendre un malin plaisir. Je rends ce qu'on me donne. Toujours. Le bien comme le mal.
Daphnée leva une main:
   - Doucement Cyrielle. Je ne dis pas ça pour te mettre en colère. Au contraire, c'est parce que je pense que tu es quelqu'un de bien que je préfère te prévenir. Si je ne te sentais pas, je te laisserai faire une connerie et te le ferai payer tout simplement.
Je la regardais me sourire après cette dernière phrase et malgré ses menaces, c'est vrai, je n'y vis aucune animosité. Daphnée m'indiquait, en quelque sorte, de ne pas la considérer comme mon ennemie. Je préférais ne pas épiloguer pour le moment, et invitais Lysandre à aller en cours. Il me tînt la porte et avant de m'éloigner j'ajoutais tout de même:
   - ... Je crois aussi que tu es quelqu'un de bien Daphnée. Prends soin de l'autre déchet.
Quand Lysandre et moi partîmes, j'entendis notre infirmière tirer sa chaise et rire joyeusement.

Puisque nous avions un mot de retard, Lysandre et moi ne nous sommes pas vraiment pressés pour aller en cours. Les couloirs étaient vides, les salles de classe pleines et nous n'entendions que le bourdonnement étouffé du discours des professeurs et la résonance de nos pas dans le silence. Cependant, Lysandre finit par le rompre:
   - Intéressante cette petite... conversation entre toi et Daphnée.
   - Tu trouves...? Répondis-je, peu convaincue.
   - Je ne l'avais jamais vu aussi mordante.
   - Elle a fait des sous-entendus étranges...
   - A quel propos?
   - A propos de ton meilleur ami...
   - Ah, lâcha-t-il. Oui, en effet...
Il ne poursuivit pas.
   - ... Et? Insistais-je. Tu veux pas m'éclairer un peu?
Il marqua une courte pause avant de tourner la tête vers moi:
   - Je ne te pensais pas aussi curieuse Cyrielle.
  - Je ne suis pas vraiment curieuse. J'ai juste eu l'impression que Daphnée me comparait à quelqu'un. Quelqu'un de mauvais et j'aurai voulu savoir qui il ou elle était.
Nouveau blanc. Il poussa finalement un soupir:
   - Elle.... Si quelqu'un doit te parler d'elle, c'est Castiel, pas moi. Je suis désolé.
Il semblait réellement l'être.
   - Ne le sois pas. Je comprends ta position. Merci d'être honnête.
   - Je m'efforce de l'être.
Il me fit sourire. Ce garçon était d'un calme à toute épreuve et plein de tact. Il était apaisant et je me demandais comment il faisait pour supporter Castiel depuis tout ce temps. Nous arrivâmes près de notre salle de cours. Je posais la main sur la poignée de la porte quand des pas pressés se firent entendre derrière nous et une voix féminine essoufflée nous interpela:
   - Attendez! Souffla-t-elle. Attendez moi s'il vous plait!
Nous nous sommes tournés pour voir arriver Violette, le front légèrement humide en raison de sa course, les bras chargés de bouquins et un petit coupon rose tenu entre ses doigts. Elle s'arrêta à notre niveau et se pencha en avant, appuyée contre le mur pour reprendre son souffle:
   - Merci.
Je me permis de prendre les livres qu'elle avait en main pour la soulager un peu:
   - Ne nous claque pas entre le doigts s'te plaît! On revient tout juste de l'infirmerie, ce serait bête d'avoir à refaire un aller-retour!
Violette ria malgré sa difficulté à réguler sa respiration et Lysandre esquissa un sourire:
   - Il est temps d'y aller, on a assez fait attendre le prof comme ça, ajouta-t-il.
Il ouvrit alors la porte après avoir toqué et le professeur interrompit son discours:
   - Oui?
  - Excusez-nous pour le retard Monsieur. Nous revenons Cyrielle et moi de l'infirmerie où nous avons déposé Castiel qui n'était pas en forme. Voici notre mot de retard.
Lysandre prit également le coupon rose  que Violette avait encore dans sa main et alla vers le bureau pour les donner au professeur. Certains élèves s'étaient retournés sur leur siège quand nous avions ouvert la porte pour voir qui était en retard. Ambre en faisait partie. Elle nous regarda de haut en bas et fixa quelques secondes ses yeux turquoises sur moi avant de refaire face au tableau noir.
   - Bien, merci Lysandre. Vous pouvez regagner vos places. Mademoiselle Redfield, asseyez vous où vous trouverez de la place. Nous allons poursuivre...
Il se retourna vers son tableau et continua d'écrire ce qu'il avait commencé avant notre arrivée. Violette allait partir vers sa place devant mais je la retins par le bras et chuchotais:
   - Tu viens à côté de moi?
Elle fit des yeux ronds mais hocha la tête presque immédiatement.
   - Ou... Oui.
Nous nous sommes installés à une table libre près d'une fenêtre. Le cours que nous suivions était un cours de Philosophie d'un ennui mortel. Violette était concentrée sur le discours du prof mais ne prenait que très peu de notes, remplissant ses feuilles de gribouillages beaucoup plus aboutis que ceux présents sur mes cours. La pile de livres que je l'avais aidé à transporter à son arrivée étaient des recueils de tableaux de peintres principalement impressionnistes. Monet, Cézanne, Degas, Renoir et j'en passe.
Je sais que ce n'est pas poli mais j'ai passé une bonne partie de mon temps à observer cette petite nana assise à côté de moi qu'à suivre le cours, ma main m'empêchant de beaucoup écrire. Violette finit par s'en rendre compte:
   - Tu ne prends pas le cours? Me demanda-elle en pointant le tableau du bout de son stylo.
J'agitais mon poing bandé au dessus de la table et elle sembla soudain confuse:
   - Pardon! Je ne savais pas!
   - Mais pourquoi tu t'excuses? Riais-je.
   - C'est vrai. Pardon c'est idiot.
   - Encore une fois, souris-je, ma tête appuyée sur mon autre main.
   - Zut, murmura-t-elle.
A mon grand étonnement, Violette se mit à rougir et pencha la tête vers sa feuille, comme pour se cacher. Je me demandais alors si je ne le lui faisais pas peur au final, elle semblait très mal à l'aise.
   - Violette, c'est peut-être à moi de m'excuser. Tu t'es sentie obligée de venir à côté de moi quand je te l'ai demandé?
   - Non je...
   - Je te mets mal à l'aise?
   - Non...
   - Je te fais peur alors?
   - MAIS NON!
Elle avait oublié de chuchoter. L'ayant poussé à sortir de ses gonds, elle avait parlé fort, même plus fort que le professeur qui s'était arrêté dans sa démonstration tout comme les élèves s'étaient arrêtés dans leur conversation et nous regardaient à présent, perplexes, devant Violette qui commençait à virer au pivoine et moi affublée d'un sourire amusé.
   - Un problème avec ce que je viens de dire Mademoiselle Applewhite?
Me tournant vers le tableau, je vis à quel point le regard de Monsieur Bogard était mauvais et hautain.. Il transperçait la pauvre Violette de ses yeux sombres et je la vis perdre petit à petit ses moyens:
   - Non Monsieur, je...
   - Peut-être pourriez vous m'éclairer sur la teneur comique de mes propos? Et ce qui a provoqué une si violente et bruyante (il insista sur ce mot) interruption de votre part.
   - C'est à... dire que...
Violette balbutiais de plus en plus, son regard passait de sa feuille au professeur, perdus. Je pris la parole:
   - Euh... Monsieur, je m'excuse mais...
Il me coupa d'un claquement de doigt:
   - Ce n'est pas à vous que je m'adresse Mlle Redfield aussi je vous prierai de ne pas vous en mêler.
   - Mais c'est moi qui suis responsable de la réaction de Violette, repris-je, alors ce n'est pas la peine de la blâmer!
Je vis ma voisine tourner ses yeux gris vers moi un bref instant mais le professeur ne décolérait pas pour autant et semblait ne pas vouloir m'écouter:
   - Ce que vous avez à dire ne m'intéresse pas! Toutes les deux vous vous permettez d'arriver en retard à mon cours pour le perturber de surcroît..
Cette fois je ne pus m'empêcher de le couper et de hausser le ton:
   - Mais enfin c'est ridicule, puisque je vous dis que...
   - SILENCE! Hurla-t-il.
Il s'avança à pas rapides vers notre table sous le regard de la classe. Il pointa son morceau de craie blanche successivement sur nos deux visages, les dents serrées:
   - Plus un mot de votre part à toutes les deux ou vous aurez affaire à moi. Violette vous me décevez. Quant à toi Cyrielle...
Il me fixa, comme un chien sur le point de mordre:
   - ... j'ai eu vent de ton cas. Les fortes têtes dans ton genre ne font pas long feu avec moi alors je te conseille de ne pas me provoquer.
Violette murmura un ultime "mais" avant que le professeur ne lui assène un nouveau regard furieux et poursuive son cours. Il m'avait tutoyé, parlé comme un maître parle à son chien pour le dresser. Aucune marque de respect, menaçant, sévère. J'en déduisis sans  grande difficulté après son petit speech sur "mon cas" que ce Bogard était probablement un des "bons éléments" professoral à la somme de notre chère Directrice. Je m'affalais négligemment sur ma chaise et soutînt le regard de mon professeur de philosophie, chassant le plus calmement possible l'air brûlant de mes poumons. Il se retourna finalement vers le tableau. Je fulminais:
   - Pauvre con, crachais-je, amère.
Je tournais la tête vers ma voisine de table et je la vis, le visage penché vers sa feuille, le regard embué, la lèvre tremblante. Je n'en revenais pas. Elle était vraiment sur le point de s'effondrer. 
   - Hey, chuchotais-je, hey Violette, c'est pas grave. Calme toi...
Je lui frottais le dos du mieux que je pus malgré ma main douloureuse pour lui apporter un peu de réconfort mais je vis une larme tiède s'écraser sur sa feuille de cours, faisant dégouliner l'encre d'un de ses dessins. Elle commençait à hoqueter légèrement:
   - Je m'excuse, c'est à cause de moi si tu t'es faite disputer. J'irai voir le prof à la fin du cours pour lui expliquer.
Elle renifla le plus discrètement possible, ne voulant d'évidence pas attirer davantage l'attention. Elle essuya quelques larmes du revers de sa manche:
   - Ne t'en fais pas, fit-elle. J'ai l'habitude...
Elle avait murmuré cette dernière phrase dans un souffle, comme résignée. Violette était fragile, ça, il n'était pas difficile de le deviner. En fait non, elle n'était pas fragile... Elle semblait fragilisée. Par quelque chose qui m'était alors inconnu. Elle secoua la tête, fouilla dans son sac pour en sortir un petit mouchoir en papier violet et se tourna vers moi avec un sourire timide:
   - Je vais bien, ne t'en fais pas.
Je fis la moue et me saisi du mouchoir qu'elle avait utilisé pour essuyer sa feuille:
   - Toi, tes parents ont bien choisi ton prénom, répondis-je en me servant du petit bout de tissu pour essuyer une larme oubliée sur sa joue pâle. Je lui pinçais ensuite le nez avec:
   - Mam'zelle Violette.
Elle fut surprise puis une fois libérée de mon emprise, elle pouffa de rire avant de reprendre son mouchoir humide et de le ranger dans sa poche. J'étais contente de lui avoir rendu le sourire mais ses dernières phrases me restèrent quand même en tête. Ses derniers mots sonnaient terriblement faux. J'en restais là pour le moment.

 Le cours terminé, comme promis, j'eus une petite conversation avec notre professeur. Je lui expliquais tant bien que mal ma responsabilité dans la réaction excessive de ma camarade. Il ne me prêtait guère attention. Quand il me répondit, il ne prit pas le temps de me regarder, trop occupé par ses copies à corriger mais il ne se gêna  pas pour me réprimander encore sur mon comportement, me rappeler de ma situation bancale dans cet établissement et que si aujourd'hui il s'agissait d'un simple avertissement, la prochaine fois il serait moins clément. En repartant, je haussais les épaules et fouillait mon sac à la recherche de mon agenda, je n'avais pas encore retenu mon emploi du temps par cœur, et les élèves étaient partis en classe pendant que je discutais avec Mr Bogard.
   - Prête pour notre cours d'Anglais?
La voix douce et cristalline de Violette me surpris et en passant la porte, je remarquais qu'elle m'avait attendue.
   - Qu'est-ce-que tu fais là? Demandais-je. Tu vas être en retard.
   - Mlle Anderson est beaucoup plus sympa que notre prof de Philo. Je ne me fais pas de soucis et je suis sûre que tu vas l'apprécier.
   - Tant mieux, l'anglais est une des matières où je m'en sors le mieux alors autant que la prof soit cool.
Pendant que nous marchions rapidement pour rattraper la sonnerie qui n'allait pas tarder à retentir, elle me montra quelques uns de ses derniers dessins qui étaient vraiment magnifiques. De penser que sa famille ne la soutenait pas alors que son talent crevait les yeux me dépassait. Quand finalement nous atteignîmes la salle d'anglais, quelques étages plus hauts, je fus accueillis par une femme d'une élégance incroyable. Coiffée d'un carré long, roux, d'une peau pâle et d'un visage aux traits fins, elle s'excusa auprès de l'élève auquel elle parlait pour venir vers moi à la porte:
   - Cyrielle c'est ça? me demanda-t-elle en retirant ses délicates lunettes rondes.
Je hochais simplement la tête pour acquiescer:
   - Je suis Mademoiselle Anderson, ravie de t'accueillir dans notre lycée et dans cette classe. J'aimerais te parler à la fin du cours si tu n'y vois pas d'inconvénient.
   - Non, aucun, répondis-je en espérant que je ne n'aurai pas droit à d'énièmes menaces.
Elle sourit en me regardant de ses yeux tilleuls et s'éloigna vers le tableau, attendant patiemment que tout le monde s'installe.
Elle portait un tailleur souris et une paire de chaussures à talons de taille raisonnables. Elle était petite, probablement la trentaine et ravissante.
   - Je t'avais dit quelle était sympa non? fit-Violette en serrant ses bouquins.
   - Ouaip.
Nous nous sommes assises à une table toutes les deux, non loin de Lysandre cette fois. Le cours était assez vivant, Mlle Anderson mettant un point d'honneur à ce que ses élèves participent à son cours. Tous, les bons comme les moins bons. Violette ne participait que quand on l'interrogeait mais son accent, très britannique, était parfait. Lysandre s'en sortait très bien aussi. Iris y mettait de la bonne volonté mais avait du mal avec la prononciation. Mlle Anderson me mit souvent à contribution et je lui répondis avec aisance. Elle m'avait tout appris de cette langue. D'abord à reculons, en ado têtue et bornée que j'étais, puis j'y ai pris goût. Je comprenais ainsi facilement les textes qu'Elle écrivait dans sa langue maternelle. Ses textes. Ses chansons. J'ai eu l'impression que cela faisait des années que je n'avais plus discuté en anglais... Alors que Sa disparition ne datait que de quelques semaines. Je soupirais.

La sonnerie du déjeuner sonna finalement. Violette sortie accompagnée de Lysandre et Iris. Moi, je rangeais mes affaires quand Mlle Anderson m'interpela, assise à son bureau:
   - Cyrielle? Tu peux venir s'il-te-plait?
Je m'exécutais, mon sac sur mon épaule. Elle se leva de son siège et me le tendit pour que je m'y asseye, elle s'installa en face de moi, sur le bord de son bureau.
   - Alors comment ça se passe à Sweet Amoris?
J'eus un court moment de réflexion:
   - ... Bien j'imagine. Je ne suis là que depuis 3 jours alors bon...
   - Et tu t'es fait ça comment? Demanda-t-elle en me montrant ma main d'un signe de tête. Je cachais cette dernière sous la table, gênée pour je ne sais quelle raison.
   - Rien de grave?
   - Une simple... entorse.
   - Que tu t'es faites en...?
   - Perdant mon sang froid. Eeeet c'est un casier qui en a fait les frais.
Cette remarque la fit rire joyeusement. Elle repris son sérieux et se pencha vers moi:
   - Comment vas-tu?
   - Euh... Vous m'avez déjà demandé comment...
   - Non, pas ici, au lycée. Je te demande comment TU vas.
Je l'ai observé, sceptique. Pourquoi me poser cette question. Elle ne me connaissait que depuis 1 heure et déjà elle s’immisçait dans ma vie. Pourquoi me poser la seule question à laquelle je ne voulais pas répondre.
   - Je vais...
   - Cyrielle, je ne veux pas te brusquer. Je comprends que tu n'aies pas envie particulièrement d'en parler avec un professeur mais écoute. Comme tout le personnel de ce lycée, j'ai eu ton dossier entre les mains. Certains l'ont survolé, d'autres l'ont lu avec plus d'attention. J'en fais partie. Tu viens de perdre quelqu'un d'important dans ta vie, de très important et tu es désormais seule n'est-ce-pas? Pour gérer cette... perte?
Je regardais mes pieds, mes mains empoignant mes genoux et mon esprit parasité par des milliers d'images qui se bousculaient violemment dans ma tête. J'avais beau y réfléchir, retourner cette question si simple dans tous les sens mais je n'y trouvais aucune réponse:
   - Le but de cette discussion n'est pas de t'embêter. Je ne te forcerais jamais à parler si tu n'en as pas envie, cependant si tu en ressens le besoin, tu pourras venir me voir.
Je pris mon visage dans mes mains et m'appuyais sur mes genoux en soupirant profondément. Je me balançais d'avant en arrière au rythme d'une de Ses chansons. J'en murmurais les paroles si bas que, si proche de moi fut-elle, Mlle Anderson n'en saisit pas le sens. Mais Ses mots résonnaient dans ma tête, Sa guitare lancinante, Ses cris, Sa dernière phrase:
   - Oooh, it's true... I miss you...
Elle posa sa main sur mon épaule, je sentis ma lèvre trembler:
   - Cyrielle?
Je me redressais et vis Violette dans l'embrasure de la porte. Je jetais un coup d’œil vers mon professeur qui m'observait, soucieuse.
   - Désolée, bafouillais-je, je dois...
   - Je ne te retiens pas, fit-elle, simplement n'oublie pas ce que je t'ai dit, je le pense vraiment.
Je rentrais ma tête dans mes épaules et marchais rapidement en direction de la sortie, lâchant un "merci" furtif à son attention, et empoignait Violette par le bras en direction de l'infirmerie.
   - Ça va? Tu te sens pas bien?
Assez de cette question, je ne prie pas la peine de répondre et l'invitais à presser le pas. J'avais faim oui, mais je voulais quand même m'assurer que l'autre débris n'était pas trop amoché. Je toquais à la porte et trouvais Daphnée au téléphone qui me demandait de patienter d'un signe de main. Je rentrais tout de même, suivie de Violette, et entrouvrais le rideau qui cachait le lit sur lequel j'avais abandonné Castiel quelques heures plus tôt. Il pianotait quelque choses sur son téléphone, un sourire en coin aux lèvres. Je le sortis de sa contemplation en mettant un coup de pied dans son lit. Il sursauta et regarda dans ma direction avant de s'écrier en sautant du lit:
   - Cyrieeeeeelle! Enfin tu daignes te soucier de mon état!
Il se jeta dans mes bras et pour une fois, je riais de bon coeur et lui tapais chaleureusement dans le dos.
   - Ouais Castiel, j'suis contente de te voir en forme.
   - Hahaha c'est parfait! Oh!
Il fit des yeux ronds et s'écria en me repoussant légèrement:
   - Tu m'as ramené Miss Applewhite? Comment t'as fait?
Violette baissa la tête et répondit timidement avec un petit signe de main:
   - Salut Castiel, tu vas bien?
   - Un peu que je vais bien!
Il s'agrippa à nos cous pour nous attirer à lui en brayant comme un poissonnier:
   - J'ai raté la matinée de cours, j'ai fait une sieste du tonnerre, j'me suis fait dorloter par Daphnée et j'émerge de ma gueule de bois pour vous voir toutes les deux dans mon champs de vision! Parfait je te dis!
   - Et tes vacances prennent fin maintenant! Cria Daphnée de son bureau. T'as bien assez roupillé pour la journée, retourne en cours, ça te fera pas de mal!
Castiel tira le rideau complètement et alla récupérer son sac et sa veste près de Daphnée:
   - N'oublie pas que je t'ai demandé de faciliter un peu la vie de Cyrielle en lui prenant ses cours le temps que sa main se rétablisse, ajouta l'infirmière, le nez plongé dans de la paperasse.
   - Je... J'ai pris les cours de ce matin, je comptais les prêter à Cyrielle, dit Violette, alors ne vous inquiét...
   - Tut! La coupa Daphnée. Ne lui donne pas d'excuses supplémentaires. Pour la peine, il prendra vos cours à toute les deux pour cet après-midi.
   - QUOI?! S'écria Castiel, apparemment pas d'accord.
   - Moi ça me va, répondis-je, tout sourire.
Il me fusilla à nouveau du regard et j'entendis Violette rigoler discrètement. Il finit par baisser les bras:
   - BON! D'ACCORD! Mais Daphnée, attends toi à ce que je vienne gâcher tes journées de boulot la semaine prochaine!
    - Ouais, ouais... Allez, filez, figurez-vous que je n'ai pas mangé et que je meurs de faim.
Elle nous chassa gentiment de son cabinet et nous partîmes au réfectoire pour manger. Cette fois-ci nous sommes resté à l'intérieur et nous sommes installés à une table ronde de quatre places où nous avons mangé, Castiel et moi, un plateau repas pas très ragoûtant. Violette avait apporté son déjeuner "comme tous les jours" nous avait-elle dit.

La journée se termina enfin et nous sortîmes du lycée, pas mécontent d'être en week-end. Cela ne faisait que trois jours que j'étais revenue dans le système scolaire et je ressentais déjà un ennui mortel m'assaillir. Vivement que j'arrive chez moi et que je végète sur mon canapé, une bière à la main.
   - Bon, fit Castiel, Cyrielle je rentre chez moi. Je vais m'occuper de Démon et faire trois courses pour notre repas de ce soir.
   - C'est pas la peine Castiel, je vais m'en sortir toute seule. J'ai...
   - T'en fais pas, j'ai aussi des projets pour ce week-end mais comme tu t'es "occupée" de moi ce matin et que tu m'as évité des emmerdes avec la dirlo, j'préfère te remercier en te faisant encore à bouffer puisque tu ne désires pas disposer de moi d'une autre façon.
Je levais les yeux au Ciel et capitulais:
   - Très bien... Violette?
   - Hein? Quoi?
Elle était en train d'observer le vent souffler dans les branches d'un saule pleureur quand je l'ai tiré de sa contemplation:
   - Tu veux  manger avec nous ce soir? Demandais-je.
Elle avait la bouche entre-ouverte et ses yeux papillotaient légèrement avant que finalement elle ne reprenne la parole:
   - Euh... Non, non, je ne veux pas déranger. M'imposer. Je dois... rentrer de toute façon. Je...
   - Okay, fis-je, tant pis.
   - Désolée, dit-elle.
Elle s'éloigna vers l'arrêt de bus suivi de Castiel qui me fit un signe de main auquel je répondis de la même façon avant de rentrer à pied chez moi. L'air se rafraîchissait sérieusement. Je fermais mon perfecto et marchais rapidement, les muscles crispés jusqu'à mon portillon. Trigger grattait contre la porte d'entrée et quand je l'ouvris, il fonça entre mes jambes renifler un des buissons mal en point du jardin pour faire ses besoins. Je me déchaussais et jetais mes chaussures au milieu de la pièce et ma veste sur une chaise de bar. J'allumais une cigarette et m'affalais sur mon vieux canapé. Je repensais à ma conversation avec ma prof d'anglais. Est-ce-que j'allais bien? Est-ce-que j'avais besoin d'en parler? Si oui, à qui? Avec qui partager les souvenirs d'une vie que j'ai été obligée de garder discrète, secrète alors qu'Elle était encore de ce monde. Ma cigarette se consumait au bout de mes doigts sans que je ne tire dessus. Je regardais mon plafond couvert de tâche d'humidité et de crasse, de fumée et d'excès. Sur les murs, le sol, dans tous les coins de cette maison, les traces de Son existence, de Son passage étaient imprégnés à jamais. Tout comme ces traces salissaient mes pensées. Je n'avais pas encore la force de demander de l'aide pour les effacer.

Le plaid que j'avais prêté à Castiel la nuit dernière était toujours sur l'accoudoir. Je m'en saisis et recouvris mon corps de la fine couverture polaire.
   - Tiens. Castiel porte un parfum que je ne connais pas, pensais-je.
Je m'assoupis sans m'en rendre vraiment compte, bercée par le bourdonnement du programme télé insipide que j'avais allumé machinalement. Ma sonnette retentit soudain avec insistance et malgré l'envie de me cacher jusqu'à ce que la personne passe son chemin, je sortis, résignée, de la chaleur réconfortante de mon plaid que je lâchais sur le sol et me dirigeais le pas traînant vers ma porte d'entrée.

11 commentaires:

  1. Bonjours bonjours ~
    Je viens t'annoncer que je fais une mise à jour totale du répertoire donc si tu pouvais à nouveau remplir le formulaire d'inscription cela m'aiderai.
    Merci d'avance et bonne soirée.
    Hina.

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  2. Bonjours decay je m'excuse mais je ne pourrait pas lire ce texte la couleur étant trop clair parce que j'utilise mon portable ! Je reviendrai donc a la charge avec un ordinateur bisous :D.

    Morgan07

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  3. Ahlala, Enfin! j'ai envie de dire. mais je ne peux absolument pas t'en vouloir tellement ce que t'écris est bon ! J'adore vraiment ton histoire, sur facebook tu disais que tu avais coupé le chapitre en deux ça va dire que la suite et déjà prête ? ou du moins commencé ? En tout cas il me tarde vraiment de lire la suite !:)

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    1. Coucou Lucie et merci de faire partie des rares lectrices ayant eu la patience d'attendre ce foutu chapitre et de le commenter xD
      Le chapitre 10 du coup à un tiers de son contenu d'écrit mais le reste déroulement est déjà bien ficelé dans ma tête :)
      Je vais quand même avant de le sortir m'efforcer de terminer les colos des chapitres 8 et 9 qui ne sont encore qu'au stade d'aplats :)
      J'ai aussi en projet de refaire toutes les illus de crossroads à ce jour mais ça demande pas mal de boulot et on va y aller mollo :p
      bise!

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  4. Bonjour!
    Je viens de lire ton dernier chapitre avec un grand plaisir! Qu'est-ce que je l'attendais! Et je dois dire que je ne suis pas déçue, ça non! :)
    Il y a plein de trucs de je voulais dire, mais maintenant, je sais plus ce que c'était. (<-- phrase qui ne sert à rien)Ah, si! Cyrielle vient tout juste d'intégrer le lycée, mais elle a déjà une bonne relation avec Castiel, une espèce de complicité qui me fait beaucoup rire. Surtout quand elle l'appelle par des surnoms comme "l'autre débris"! XD En plus, tu respectes vraiment bien les caractères des personnages, même celui de Lysandre, qui est souvent dénaturé. Et Violette! Aussi adorable que d'habitude. J'espère qu'elle va pouvoir sortir de son cocon au contact de Cyrielle.
    bref, continue comme ça, ce que tu fais est génial!

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    1. Coucou! Ha je suis très heureuse que tu aies patienté si longtemps pour lire ce chapitre qui a tellement tardé à arriver! Mille excuses pour ça x(
      J'essaye de garder le caractère des persos AS proches de ce qu'ils sont mais j'apporte à chacun d'eux une histoire bien particulière. Violette c'est mon chouchou, elle aura un rôle très important dans mon histoire, j'y met un point d'honneur!
      VIVE LES SALES DÉBRIS! o/

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  5. Bonjour Ma chère Alice,

    Encore un chapitre génialissime. J'e l'ai dévoré... Tu fais vraiment partie des rares personnes dont je lis la fanfic... Comme d'habitude c'est original et tellement bien ficelé ! ♥

    La fin est très frustrante, il va falloir prendre mon mal en patience pour continuer de voir Cyrielle et Castiel se lier d'une amitié touchante (et pit-être amour ? :p )

    Bisous

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    1. Ma petite lala je suis contente que mes chapitres te plaisent toujours autant, c'est important!
      Je t'avoue (comme on en a déjà parlé) aimer créer ses liens entre Castiel et Cyrielle petit à petit et ne pas les faire plonger trop vite dans une histoire d'amour ennuyeuse. Je veux tisser les choses, que leur attachement se créé sans même que les lecteurs ne s'en rendre compte :p

      Patience ça arrivera, mais pas de suite :p
      A QUAND LA SUITE DE BLAST!!?? et faut qu'on recause de notre "projet" avorté de cet été

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  6. Hey !!

    Oui, c'est seulement maintenant que je lis enfin ce chapitre.. Quand la flemme me tient e_e.
    Bref !!
    Comme toujours j'adore !!
    L'attitude de Castiel totalement à l'ouest est juste excellent. Plus les chapitres avance, plus on s'attache au personnage de Cyriel.
    L'amour vache entre Cyriel et Castiel, j'adore 8D. Et enfin une histoire où Violette est tout de même pas mal présente (en même temps, je n'en lis pas énormément) :3.

    Hâte de lire la suite !!
    Bon courage ^^

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  7. My god je lis enfin la suite c'était génial j'ai hâte de lire la suite! Tu écrit toujours aussi bien :D je n'ai rien a te dire tout est tellement bien écrit. J'ai hâte de savoir qui est Elle et donc de lire la suite ;) bisous bisous bonne soirée/journée !

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  8. Salut, n'y a-t-il pas de suite depuis le temps ? J'aime vraiment la façon dont tu écris, c'est juste vraiment original, et j'ai beaucoup l'histoire. mais j'ai vu que ca date depuis 2012 donc blogue et je trouve cela dommage de ne pas avoir de suite...

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